Bienvenue sur mon
journal en ligne
(pour lire la
version la plus récente, cliquez sur « actualiser », l’icône aux deux
flèches qui se trouve plus haut)
Photo G.Verneret
« Ai-je laissé quelque chose à voir
derrière moi ? J’y retourne, c’est toujours mon chemin. Je ne trace aucune
ligne certaine, ni droite, ni courbe. (…) J’entreprends seulement de me branler
quand le branle me plaît. Et me promène pour me promener. »
Tonton
Montaigne (Les Essais, III, 9)
Cliquez ici pour accéder au
forum, échanger, réagir à mon journal…
CE SITE VA ETRE PROGRESSIVEMENT MIS EN VEILLE. SI VOUS SOUHAITEZ CONNAITRE
LA SUITE DE MES PASSIONNANTES AVENTURES (Avec qui me fâcherai-je le mois
prochain ? Quelle terrible malédiction frappe mes différents éditeurs ?
Irai-je au Tibet ?), RETROUVEZ-MOI SUR http://houdaer.hautetfort.com/
Lundi 28 mai
On en
reparle
de mon Polar Grimoire.
A signaler que l’individu très recommandable qui me questionne
est également (entre autre) l’auteur de ce blog musical.
Autrement, j’ai rafraîchi quelques liens très anciens dans ce blog.
N’hésitez pas à me signaler ceux qui s’avèreraient défectueux.
Pour mon emploi du temps de juin, voir en page
« actualités ».
Mardi 15 mai
Jeudi 24 mai, à 18h30, je lis (avec les
(h)auteurs) sur le thème « Ogres et boucherie », et signe mon dernier
livre à la librairie « Au bonheur des ogres » (9 Grand Rue de Vaise,
Métro Valmy, à 40 mètres de la Médiathèque).
Mercredi 2 mai
On
en cause de la nouvelle collection Polar
Grimoire.
Lundi 1ier mai
Mon feuilleton baudelairien,
commencé lors du marathon d’écriture de ce week-end :
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU
SEXUELLES AVENTURES DE CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (1)
charles baudelaire
est un poète
il a touché une bourse en tant que tel
il est édité
chacun de ses différents recueils possède son code
ISBN
on lit ses textes
sur différentes scènes
on en parle
dans de jolies revues
pourtant
il se souvient avoir offert à sa jeanne duval
il n’y a pas si longtemps de cela
à l’occasion de son anniversaire
un aspirateur
d’autres cadeaux entouraient l’engin à enrouleur de
prise automatique
des présents plus beaux et moins utiles
mais il a bien offert
un aspirateur
emballé dans du papier-cadeau
à sa muse
qui accabler ?
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU SEXUELLES AVENTURES DE
CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (2)
charles
baudelaire
veut
tourner un documentaire
sur
des bestioles nocturnes
qui
n’ont jamais connu l’honneur
d’un
film animalier
les
poissons d’argent qui virgulent chaque soir
sur
le sol de ses toilettes
las
charles
baudelaire n’a pas le sou
pour
acheter une caméra
alors
il demande une subvention
comme
on la lui refuse
charles
baudelaire casse la tête
d’un
fonctionnaire de la culture
après
il
va en prison
mais
c’est déjà un autre épisode
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU
SEXUELLES AVENTURES DE CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (3)
charles baudelaire
sent bien que son procès
s’annonce mal
alors
il saute dans un train
se rend sur une grosse montagne
pleine de neige
où il apprend à chausser les skis
sa jeanne duval est là
pour l’applaudir
quand il décroche sa première étoile
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU SEXUELLES AVENTURES DE
CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (4)
à
une jolie prostituée
charles baudelaire
montre
ses initiales
allumées
au dessus du distributeur automatique
de
billets
façon
de lui dire
fais-moi
confiance
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU SEXUELLES AVENTURES DE
CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (5)
roulant à vive allure
charles baudelaire aperçoit au dessus de l’A.6
un panneau lumineux
« DES HOMMES TRAVAILLENT
SOYEZ VIGILANTS »
il en attrape des frissons
les mains rivées sur son volant
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU SEXUELLES AVENTURES DE
CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (6)
charles
baudelaire se fait du soucis
sa
jeanne duval est entrée dans une secte
celle
des généalogistes
elle
harcèle les archives municipales
au
poète
elle
a des photos à montrer
celles
de ses ancêtres
tous
y sont
les
airs de vieille fille revêche
les
superbes bacchantes
les
beaux uniformes
les
longues jupes
tout
y est
à
l’exception
des
chevilles et des poignets
des
gorges et des voix
reste
sa jeanne duval
avec
toutes ses preuves
de
quoi ?
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU
SEXUELLES AVENTURES DE CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (7)
charles baudelaire
anime des ateliers
d’écriture
il demande à des gens
qui ont payé pour cela
de décrire leur trousse
en quarante lignes
minimum
cela lui laisse le temps
de réviser
le texte de son dernier
poème
sobrement intitulé
LES PALPITANTES BIEN QUE FORT PEU SEXUELLES AVENTURES DE
CHARLES BAUDELAIRE AU XXIème SIECLE (8)
devant
le distributeur de pailles du Mac’Do
charles
baudelaire rencontre zarathoustra
les
poètes mentent trop
charles
baudelaire ne cherche pas à le contredire
il
est pressé de ramener son plateau
à
sa jeanne duval qui a un appétit de louve
Mardi 17 avril
Naissance de la collection Polar-Grimoire. Deux livres
pour l’étrenner : celui de Renaud, et le
mien :
Mercredi 11 avril
Rimbaud parlait d’un « long… quoi, déjà ? ».
Vendredi 30 mars
Ces derniers jours, j’ai repris contact
avec Leonard Cohen, René
Char, Cormac Mac Carthy, etc.
Ces derniers jours, j’ai animé un atelier
d’écriture en prison qui, des trois heures initialement prévues pour son bon
déroulement, a été raccourci à moins d’une heure grâce à la mauvaise volonté de
certains surveillants. Le temps de trajet aller-retour jusqu’à cette prison,
quant à lui, a été maintenu à presque quatre heures.
Ces derniers jours, j’ai animé la
rencontre Pascal Garnier-Nan
Aurousseau qui a failli tourner au pugilat. Au milieu du ring, je me suis
souvenu que mon job-d’une-après-midi était celui de modérateur. Même le vent
jouait contre moi, secouant le chapiteau sous lequel avait lieu la rencontre,
pilonnant l’hippodrome de Bron où se déroulait la Fête du Livre.
Ces derniers jours, j’ai lu un livre par
jour. La routine. Le contraire de la routine.
Ces derniers jours, j’ai payé pour voir un film rempli de
spartiates et d’hémoglobine. Les éléphants (numérisés) y réussissaient de jolis
sauts dans le vide.
Ces derniers jours, je suis retourné
à Brest (plusieurs chapitres de mon nouveau roman s’y déroulent) grâce à la
lecture d’une B.D (« Un homme est mort »,
Kris/Davodeau chez Futuropolis, l’histoire vraie du film invisible de René
Vautier).
Ces derniers jours… toujours, et de plus en plus, la
politique. J’ai emprunté à la bibliothèque « Le poisson
dans l’eau », où Vargas Llosa raconte sa participation à la présidentielle
(un engagement politique qui aura duré trois ans). En exergue, cette citation
de Max Weber : « Les premiers chrétiens aussi savaient très
exactement que le monde est gouverné par les démons et que celui qui se mêle de
politique, c’est-à-dire consent à utiliser comme moyens le pouvoir et la
violence, a scellé un pacte avec le diable, si bien qu’il n’est plus assuré de
produire le bien avec ce qui est bon et le mal avec ce qui est mauvais, car fréquemment
il en va tout le contraire. Celui qui ne le voit pas est, politiquement
parlant, un enfant. »
Ces derniers jours, j’ai repassé les judogis de mes
enfants, supprimé le fromage de mon alimentation, aperçu UN de mes livres en
vente au festival Quais du Polar (« L’idiot n°2 », sur le stand de la
librairie Passages)…
Ces derniers jours, je me suis laissé conduire par une
photographe aux yeux verts jusqu’à Saint-Symphorien-de-Lay, préparé à un futur marathon d’écriture avec les (h)auteurs…
Jeudi 29 mars
Quelle
triste fête que la « Fête de l’Huma » qui s’est tenue récemment à la Fac de la Doua ! J’y ai rejoint Philippe,
responsable à la C.G.T, l’un de mes meilleurs pourvoyeurs de DVD et de livres
(le dernier bouquin qu’il m’ait passé : une biographie de Maurras !).
J’y ai également rejoint Alain, de la librairie « A plus d’un
titre ». Au dessus de nos assiettes savoyardes (fromage et patate à
volonté, mais interdiction de se resservir en charcuterie), il m’a annoncé son
intention de voter Bayrou ! Nous avons parlé haut et fort, animé la tablée
en affirmant créer un groupe d’extrême gauche pro-Bayrou. Un jeune type a même
changé de place tant nous l’indisposions !
Le stand que j’ai le plus fréquenté est celui de
Pif Gadget. J’ai été impressionné par le combat qu’ont mené des enfants pour
sauver le Pif géant (et gonflable) qui décorait le stand. Son museau frottait
dangereusement contre les néons de la salle.
Samedi 24 mars
Petit rafraîchissement de ma page de
liens (pas du luxe) : compagnie In
Time, site de Patrick Dubost,
biscotttos d’Olivier Lafay
(qui mérite bien trois « t »… d’ailleurs, s’il était un véritable
ami, il m’en refilerait quelques uns), du polar
et des pollens, etc.
Mardi 20 mars
Comme si je n’avais pas assez de
casseroles sur le feu (et au derrière ? Quand je cause cuisine, c’est
toujours d’écriture dont il s’agit), je tiens depuis quelques semaines un
« journal politique ». Pour l’heure, il reste privé. Certaines de ses
notes s’insinueront-elles jusqu’ici, jusqu’à ce blog ?
Lundi 19 mars
Comment battre Sarko, quel
adversaire lui opposer au second tour ? Cet extrait d'article de Libé,
consacré à l’arrestation de Battisti, me souffle la réponse :
" Ce «coup» serait aussi un moyen d'embarrasser
les adversaires politiques qui, lors de la polémique de l'été 2004, avaient
soutenu l'écrivain italien. Dont Dominique Voynet, qui indiquait hier qu'elle
gardait sa ligne, à savoir «le refus d'extrader un homme qui ne peut pas
bénéficier d'un nouveau procès en sa présence». Une position identique à celle
de François Bayrou, qui a répété hier ce qu'il avait affirmé en octobre 2004.
«Quelle que soit l'horreur que m'inspire cette période, l'horreur que
m'inspirent ces actes, dont je ne sais pas s'il est coupable ou pas, notre
droit français, européen, occidental, c'est qu'un homme a droit à un procès en
sa présence», a-t-il déclaré au terme de sa visite au Salon de l'Etudiant. La
position la plus prudente est venue du PS, dont le premier secrétaire, François
Hollande, était allé rendre visite à l'écrivain à la prison de la Santé en
2004, alors que l'Italie avait demandé son extradition à la France. Hier, le PS
a souligné «son attachement au respect strict de l'application des conventions
internationales sur l'extradition», mais en ajoutant que Battisti «a fui, c'est
de sa responsabilité, il n'aurait pas dû le faire. Maintenant il doit être
extradé».
C'est un type avec tracteur qu'il faut envoyer contre
Sarko (non, José, ce n’est pas toi que j’ai appelé !).
Dimanche 18 mars
Pédanterie # 3
"Génération après génération, nous avons besoin de
garder à l'esprit que Shakespeare n'a jamais été un intellectuel. Il écrivait
des pièces de théâtre pour plaire au plus grand nombre et pour gagner de
l'argent ; il les écrivait rapidement et il réussissait parfaitement ce qu'il
entreprenait. Qu'elles aient été également de très bonnes pièces, qu'il ait
accumulé peu à peu une signification cachée sous la surface et qu'il soit
parvenu à faire atteindre des sommets de beauté à la langue anglaise : tout
cela est un bénéfice pour la postérité. Hamlett est une excellente et
ténébreuse tragédie sanglante. (...) Savait-il qu'il s'agissait d'un chef
d'œuvre? Il savait que cette pièce était bonne et plaisait au public, mais,
au-delà de ces considérations, était-il conscient de ce qu'il avait accompli?
Peut-être en buvant une pinte de bière à la Mermaid Tavern".
Anna Mary Wells , "Polar mode d'emploi 1" paru
chez encrage
Samedi 17 mars
Mon nouveau roman paraîtra avec un retard
d’une quinzaine de jours.
Avec la quadruple représentation de ma
pièce « Empty », j’ai reçu un très beau cadeau. Gratitude à Carine Pauchon (la metteuse en scène), à
Adrien Bretet et à Anthony Guyon (les
interprètes).
Mardi 13 mars
Atelier d’écriture à la Maison d’Arrêt de Privas. Place
des Recollets. Je lis « Place des Recalés », puis « Place des Recollés ».
Jeudi 1ier mars
Pédanterie # 2
« Il ne s’agit pas de me faire
auteur, mais il me semble qu’un homme du monde peut avoir des pensées et les
recueillir sur un carnet. »
Mercredi 28 février
Pédanterie # 1
Description de la mode sous le
Directoire par L’Encyclopédie populaire (1899) :
« Ce ne
furent que tuniques grecques, cothurnes classiques, dolmans turcs, coiffures à
la Caracalla…. Il y eut le bal partout. Mais le plus caractéristique fut celui
sous le nom de « Bal des victimes » qui se tint à l’hôtel Richelieu.
On n’y admit que les jeunes gens qui pouvaient citer le nom d’un père, d’un
frère, d’une sœur ou d’un oncle immolés sur la place de la Révolution. En
entrant à ce bal, les danseurs saluaient « à la victime » d’une
inclinaison sèche, imitant le mouvement d’une tête que l’on coupe. De cyniques
« merveilleux » imaginèrent même de se faire raser la nuque à la
façon dont Samson accommodait ses victimes, et il y eut des
« merveilleuses » qui osèrent serrer autour de leur cou un mince
collier rouge imitant à ravir la section de la lame… Puis on chantait en
chœur :
Quand Robespierre reviendra
Tous les jours deviendront des fêtes,
La terreur alors renaîtra
Et nous verrons tomber des têtes ! »
Mardi 27 février
Où Bulle-qui-sait-lire-et-écrire
évoque « L’idiot n°2 », mon premier livre publié.
Sept ans plus tard, je n’ai pas gagné 300 € net avec ce
bouquin. Merci au Serpent à Plumes qui s’est cru dispensé de m’envoyer un
relevé de compte dès la seconde année après la parution du livre ! Je n’ai
aucun doute sur le fait que les membres de l’ancienne équipe éditoriale ainsi
que ceux de la nouvelle iront voter Ségo, la bouche en cœur.
Rien à voir ( sauf que…), ma lecture réjouissante de
« Chronique d’une liquidation politique » de Fajardie
(1993). Même si je ne suis pas (n’ai jamais été) d’extrême gauche (par dégoût
de l’alter-catéchisme), Fajardie frappe fort et juste. En 93, qui d’autre que
lui pouvait écrire un pamphlet pareil ?
Mardi 20 février
Mon mois de mars continue de se charger… de promesses (voir à la page
« actualités »). A suivre…
Dimanche 18
février
NE MÊME
PAS ÊTRE CERTAIN DE LA CHUTE
balcon
lumière
sur le
point de se décrocher
il
tient à un clin d’œil
qu’elle
me lancera
qu’elle
ne me lancera pas
peut-être
me l’a-t-elle déjà lancé
peut-être
l’ai-je raté
je n’ai
rien appris
concernant
la loi de la pesanteur
ou j’ai
tout oublié
je ne
vois pas venir
le choc
il me
faudrait des yeux
plus
que des yeux
pour
cela
Samedi 10 février
Hergé n’a qu’à bien se tenir (ah bon, il
est mort ?), je me lance dans la B.D ! À moi,
les grands prix d’Angoulèmeuh, les séances de dédicace avec service d’ordre
approprié, avec piquets et cordes pour canaliser la foule de mes lecteurs,
etc. !!!
Autrement,
mon mois de mars se dessine joliment (voir à la page « actualités »).
Mercredi 7 février
Signaler les deux livres qui m’ont le plus marqué
l’année dernière : deux biographies.
La première consacrée à Barrès, sans
complaisance et écrite dans une langue inouïe. J’invite ceux de mes amis qui
honnissent « le rossignol du carnage » (anti-dreyfusard de surcroît)
à la lire.
La seconde consacrée à René Char (quand
je l’ai attaquée, terme qui convient, Char n’était pas mon poète de
chevet). De la bagarre à chaque chapitre.
Char est un poète utile à celui qui a une porte à
défoncer, un éditeur ou un critique à mettre en mille morceaux, une injustice à
corriger.
Char est pied de biche, dynamite, poing américain capable
de frapper au fond de la gueule de l’autre.
Char a senti quand il était « juste d’être
injuste ».
Char casse la gueule à qui le mérite. Et Char est
contagieux. Char et toute sa « Wild Bunch » connaissent le rythme le
plus profond…
Char résistera au rouleau compresseur de la commémoration
qui le menace cette année.
Je n’ose imaginer ce qui se serait produit si Barrès et
Char s’étaient retrouvés dans la même pièce.
Signaler que Sarah Vajda, l’auteur du premier ouvrage
(également responsable d’une biographie assassine consacrée à Edern-Hallier)
est actuellement frappée par une
censure… pleine de sens.
Mardi 6 février
rituel informatique
double-cliquer sur
l’ICÔNE AVEC RACCOURCI
comme une double
prosternation
incliner sa flèche
la poser sur la BARRE
DES TÂCHES
mon ordinateur fait de
plus en plus de bruit
pas mes livres
Mes
vœux. Est-il encore temps de…
Pour l’année 2007 donc, être à la hauteur de / se caler sur cette phrase de
Strinberg :
« La
ruine, pour avoir de l’air et de la lumière. »
What else ?
Vendredi 2 février
Raspoutine, Walt Disney, Johnny Weissmuller, Leni
Riefensthal... et moi.
Résurrection du blog des (H)auteurs. Wilfrid a le droit
de sortir de la cale dans laquelle il a travaillé jour et nuit ces dernières
semaines.
Une belle lecture déambulatoire et collective
jeudi soir. Seul regret : que certaines personnes ne se soient pas
déplacées.
Correction des épreuves de mon prochain
roman. Ça sent l’encre (d’imprimerie) !
Jeudi 25 janvier
VISITE
À L’APPARTEMENT
je lui
fais faire
le tour
du propriétaire
elle me
suit
en
toute confiance
la
mosaïque du sol
mille
et un morceaux
de
peaux
je me
penche
pour
lui montrer
ces peaux
que j’ai aimé
caresser
lécher
mordre
elle
sait
qu’ici
on
donne ce que l’on veut
elle
sait
qu’avec
moi
il y a
un prix à payer
mais
qu’il est libre
cette
seule condition
suffirait
à donner le vertige
à
n’importe qui
elle
tombe
évanouie
je
passe à l’étape suivante
ROUSSE
la femme se
confie au docteur
elle le
fait en anglais
je
comprends que tout ne tourne pas rond
dans sa
vie sexuelle
le
docteur la trousse aussi sec
l’examine
s’exclame
AMAZING
AMAZING
elle
s’étonne
il
s’étonne
nous
nous étonnons
mes
amis et moi
face à
l’écran de télé
le doc
est formel
déclare
à la femme qu’elle n’a pas de clitoris
elle a
beau écarter les jambes tant et plus
le doc
ne revient pas sur son verdict
il
poursuit l’auscultation de sa patiente
examine
sa gorge
bingo
le
clitoris est là
caché
au fond de sa gorge
moi
c’est
au fond de mon magnétoscope
que
j’ai découvert les années 70
Lundi 22 janvier
je la
vois
grimper
dans un
bus qui ressemble
à un
vaisseau spatial
je la
vois
faire
poinçonner
son
A.D.N
je la
vois
disparaître
au
milieu des passagers qui sont autant
d’extraterrestres
je suis
le seul
être
humain
qu’elle
connaît
je le
lui crie
en vain
j’essaye
de l’écrire
sur une
vitre du bus
j’ai le
bout des doigts gelé
quand
l’engin quitte la station
il ne
me reste plus
qu’à
créer une secte
certains
ne se sont pas gênés de le faire
avec
moitié moins de visions
moitié
moins de blessures
Lundi 15 janvier
Ces derniers jours, vous pouviez toujours
taper « www.houdaer.com » dans la barre URL, vous ne risquiez pas de
tomber sur mon site. De la faute de « Gandi », boite censée permettre
de protéger les noms de domaine. Si vous créez un site, ne sollicitez pas ses
services.
Fin de la première rubrique
« consommateurs-Que choisir » de ce blog. N’en déplaise à Z.,
alias Tonton Nietzsche (« De la vertu amoindrissante »), qui
affirme joliment : « Montrer ses piquants à de menus ennuis,
c’est à mon avis une sagesse de hérisson. »
Les
pépins techniques n’arrivant jamais seuls, Wilfrid de « Là Hors De » tarde à relifter le blog collectif des (H)auteurs.
Pas à
dire, tout cela m’a mis d’excellente humeur. De quoi devenir un
« homme du ressentiment », Tonton N. ?
Lundi 18 décembre
-
T’as intérêt à avoir une bonne excuse.
-
Pour ne pas avoir alimenté mon blog ces deux derniers
mois ?
-
C’est ça.
-
Être en train de boucler un roman qui sortira en mars, ça
te convient comme excuse ?
-
C’est correct.
-
Si je recopie ta dernière réponse, on saura que t’es
québécois.
-
M’en fous. C’est quoi, ton roman ?
-
Secret industriel. Il est imprimé fin janvier. L’éditeur
vient de m’envoyer le quatrième de couverture. Du bon boulot.
-
Polar ?
-
Oui, mais un polar d’un genre nouveau. Pour moi.
Autrement, tu trouveras à patienter avec quelques textes de moi disséminés ici
et là.
-
O.K, mais… ces deux derniers mois, tu as bien fait des
choses ?
-
… Je n’aime pas tes italiques.
-
T’occupe pas de ça, pré-occupe-toi plutôt de retranscrire
fidèlement notre échange.
-
Tu peux me faire confiance.
Lundi 16 octobre
Le quatrième numéro de « La sœur de l’ange » vient de
sortir. Il vaut ses 18, 50 €. Je ne suis pas peu fier d’y présenter
(brièvement) un texte de Vialatte ainsi que d’y glisser une (longue) nouvelle.
Du côté des noms connus : Debord, Philippe Corcuff, Andrée Chédid,
Jean-Yves Leloup, André Chouraqui etc. Un cahier passionnant consacré au
« Grand jeu ». Crépu et Bernanos. Yannis Constantinidès & Sophie
Deltin pour « Nietzsche et la fiction ». Comment résumer les 250
pages de ce numéro ?
Mardi 10 octobre
Décidément, les ateliers sont les lieux qui m’émeuvent
le plus au monde.
Lundi 9 octobre
Un texte inédit de moi, et plusieurs
autres signés de la wild bunch, ici.
Jeudi 28 septembre
Samedi 23 septembre
On trouve mes livres n’importe où (même ceux dont le
tirage est officiellement épuisé).
Dimanche 10 septembre
Parler de ce que j’ai vu hier soir. Je
vais essayer. La seconde critique théâtrale de ce blog :
Elles. Et nous. Elles, « les folles d’enfer ». On s’en occupe
à la Salpêtrière, sous Louis XIV, sous Louis XV, sous Louis XVI, sous Napoléon…
jusqu’à Charcot, fin XIXe. On s’en occupe des folles, on les classe, on les
parque, on les dresse, on les punit. Pour leur bien, toujours pour leur bien.
On ne fait pas n’importe quoi avec elles. On les répertorie. On leur applique
les remèdes appropriés… pour l’époque (des saignées aux mutilations pures et simples).
Le temps passe, le Progrès avance partout. Jusqu’à la Salpêtrière. Jusqu’aux
folles. Elles aussi voient leur sort progresser, leurs chaînes être
remplacées par… des camisoles. Elles continuent de battre la campagne,
enfermées. Mises en lieu sûr (mais sûr pour qui ?).
Elles. Mâkhi Xenakis leur a consacré un texte, à
« elles ». Aux « folles d’enfer ». « Pas un texte
de théâtre, mais (…) un texte pour le théâtre », et c’est bien ce dont
s’est persuadé Christian Nadin, le metteur en scène. Reste que l’entreprise
s’annonçait délicate. Pour ne pas dire casse-gueule.
Au terme d’un long travail avec ses deux comédiens
(Bernard Gerland et Hélène Saïd, LE médecin et sa patiente au travers
des âges), Nadin est parvenu à éviter les écueils qui menaçaient sa création.
On peut parler des « Folles d’enfer » comme de
« la mise en théâtre d’une mémoire oubliée », on n’y trouvera
aucune trace de surenchère mémorielle. Nadin ne joue ni la carte de l’émotion
facile, ni celle d’un quelconque intellectualisme.
Nadin signe un travail intelligent au sens de
« précis ». Cette exactitude, il y était tenu sous peine de voir
« Les folles d’enfer » foncer dans ce mur qu’embrassent trop
facilement les spectacles engagés. Nadin ne dénonce pas, il donne à voir et à
entendre des témoignages qui relèvent de l’inouï. Et au final, il fait
confiance à ses comédiens. Il peut. Il sait les faiblesses qui font leur force.
Bernard Gerland. Comédien. Terrien. La gravité et sa loi,
sans la lourdeur. Capable d’incarner l’homme dans toute sa richesse et ses
contradictions, même quand il se fait le porte-voix d’une médecine inhumaine.
Surtout quand il tient le mauvais rôle. « Tenir », un verbe qui sied
à merveille à Bernard Gerland.
Si « Les folles d’enfer » est une mise en
théâtre bel et bien hantée, elle n’a rien de morbide. La métamorphose
incessante d’Hélène Saïd frappe d’autant plus que jamais, à aucun moment, elle
ne fait la folle. Elle ne joue pas pour Zulawski ou pour Ken Russel.
Elle joue pour Christian Nadin. Elle joue pour nous. Elle déménage… sans
bouger, ou presque. Elle n’est pas seule dans sa folie. À tout moment, des consœurs
peuvent apparaître… au bout de ses mains, marionnettes plus-que-marionnettes.
Aux yeux du spectateur, rien de plus lassant que la folie
jouée. Rien de plus fascinant que l’extrême-autre incarné avec sobriété par
Hélène Saïd.
Vendredi 8 septembre
J’ai dit littérature, ils ont répondu
gestion-commerce. Pas assez douée pour la voie littéraire, il aurait fallu
redoubler mais les parents ne veulent pas le redoublement puisque ce n’est pas
obligé.
Préparer un bac pour une fille d’ouvrier, c’est
déjà bien et puis gestion-commerce, ça fait sérieux. On dirait presque un
métier.
Et je me laisse convaincre. Aimer lire Kerouac et
Miller ne fait pas de moi une littéraire. Trop de fautes dans mes
dissertations. C’est inscrit au stylo rouge dans la
marge : « des idées, certes, mais que de fautes ! »
« GAGNER SA VIE » de Fabienne SWIATLY, éditions
de la Fosse aux ours
Mardi 5 septembre
Dimanche 3 septembre
« L’essentiel de la biographie d’un écrivain
consiste dans la liste des livres qu’il a lus »
Vendredi 1ier septembre
Quelque soit les représailles que je doive essuyer après
un pareil aveu, disons-le : je suis entré en maçonnerie. Je veux parler de
la Ligue des Lugduniens Extraordinaires. Je lui prête l’intention de devenir la
plus connue des sociétés secrètes. On verra bien…
Deux noms à balancer : les sieurs Alexis Nevil et Markus Leicht…
Lundi 28 août
« Je dormis mal. A plusieurs reprises, je
rêvai que je rêvais. Or – c’est une observation d’Edgard Poe – quand on
soupçonne que l’on rêve, on se réveille presque aussitôt. »
Jules Verne, « Le sphinx des glaces »
Samedi 19 août
Jamais pris des poses « situ », et pour cause…
Quand j’ai découvert Debord, il avait été déjà bien récupéré (détail
rigolo : à 16 ans, je croyais que lui et Manchette
ne formait qu’un seul et même bonhomme !).
C’est donc sur le tard que je m’invite chez Guy D. (qui a
« Guy D. » combien de personnes ?) pour creuser sa
moquette. Et voilà que je découvre ses notes sur l’immigration. Ça fait très,
très mal.
Pour se soigner après une telle lecture, faites rouler
souris et yeux vers les sites de Virginie
Poitrasson et de Marie-Ange
Sebasti.
Je descends en bas de chez moi, re-lire le re-cueil de
l’une de ces poétesses au pied d’un toboggan digne du Couloir de la Chimie.
Vendredi 18 août
Au début
de cet été, on m’a offert un clic-clac numérique et j’apprends
à m’en servir.
Jeudi 17 août
Alice
Pelaudeix et Bertrand Louis me tirent le(s) portrait(s) à la
page « Contact et textes à lire » (cliquez sur le bon signet puis
faites défiler).
Début août
Huit
ans après, il était temps de retourner en Bretagne.
Une semaine dans le Morbihan, avec une parenthèse
Brestoise de 24 heures, le jour de mon anniversaire. Dans cette ville
attachante mais dont le moins que l’on puisse dire est que ses rues ne puent
pas l’argent, je me suis attaché les services d’un très bon guide : Renaud.
Attention, portrait !
Après « L’homme de l’Atlantide », après « L’homme qui murmurait
à l’oreille des chevaux », voici « L’homme qui nageait au milieu des
sous-marins » !!! Pour ceux qui m’accuseraient d’irresponsabilité
après avoir lu le paragraphe suivant, qu’ils sachent que décrire une pratique
n’est pas forcément l’encourager, que Renaud est écrivain (ce qui n’excuse pas
tout, certes, mais bon…),etc., etc.
Donc, bref, en résumé, Renaud me retrouve à Brest, non
loin de deux voitures garées, d’une poubelle, et d’un feu de la circulation
(pour préciser). Il me fait faire le grand tour, de la loooongue rue de Siam à
la peinture giganto-murale de Paul Bloas (puis-je
parler d’une fresque alors qu’elle ne comporte qu’un personnage ?).
On descend de voiture, on marche, on remonte dans la
voiture, on roule, on redescend de voiture, on sort les grappins, on escalade
le château de la ville, on re-remonte dans la voiture, on redémarre le plus
vite qu’on peut, on baisse la vitre à cause de la vitre arrière qui vole sous
les impacts, etc.
Arrive le moment où Renaud me montre, non sans fierté, SA base de sous-marins. Je ne le
vois pas venir. Il prend soin de me préciser pourtant :
-
C’est là que je me fais plaisir. Ce sont les eaux les plus
surveillées de la Rade.
-
Et ?
-
Et quand je suis satisfait d’un chapitre que je viens
d’écrire, c’est ici que je me récompense.
À peine a-t-il fini sa phrase que le voilà en maillot de
bain (la transformation vestimentaire est digne de Fregoli). Et plouf ! Au
milieu de tant de béton, de militaires et d’alarmes de toutes sortes, Mister
Renaud nage. Je laisse faire. J’ai passé l’âge de suivre mes amis dans leurs
folies. Est-ce que je me ruine en publiant de la poésie comme Éric ? Est-ce que j’essaye de
survivre à la Duchère comme d’autres ?
Sûrement pas !
Pendant ce temps, Renaud est tout à ses jeux d’eau :
et que je saute au dessus de la surface pour tenter un double salto, et que je
recrache de la flotte par la bouche pour lâcher un geyser d’un mètre de haut,
et que je jongle avec un bidon retrouvé flottant entre deux eaux… Pas l’ombre
d’une mitraillette n’a encore pointé le bout de son nez (je m’améliore, du côté
des métaphores) au dessus d’un muret de béton.
C’est alors que j’aperçois une masse énorme qui se déplace
dans la mer (spontanément, je pense plus à un énorme
« étron » qu’à un cétacé). J’ai beau crier sur la rive, tout
faire pour alerter Renaud, celui-ci ne prête aucune attention à mes avertissements.
Quand il sent le sous-marin lui effleurer la plante des pieds, il avale une
grande bouffée d’air avant de se laisser couler.
Je m’agite sur la plage, commence à courir de droite et de
gauche, bouscule quelques marins joggeurs…
Je vois réapparaître Renaud un peu plus
loin. Il caresse la coque du sous-marin, tandis que l’eau a pris une jolie
couleur rouille. Ô vision Homérique (Homéresque ?).
Je n’ai pas entendu les militaires
m’encercler, l’arme au poing.
-
Le gars qui fait le con dans
l’eau, là, c’est votre ami ?
-
Heu… Oui, c’est un ami. Il
est écrivain, mais pas seulement, il est aussi directeur de collection, et… je
peux pas lui dire ce qu’il doit faire ou pas faire, vous comprenez ?
-
Ça lui prend souvent ?
-
Quand il est très satisfait
de lui. Mais il est super exigeant quant à ce qu’il écrit.
Quelques heures plus tard, seul, je me remets de mes
émotions dans le train pour Auray. Je me réjouis de ne pas avoir pris mon
nouvel appareil photo numérique Polaroïd 2500X. Ce blog n’aurait pas supporté
certaines images.
Conclusion (provisoire ?) : ce n’est pas parce
qu’on est un spécialiste international des lutins,
ou que l’on a prouvé que Ron Hubbard
était Témoin de Jéhovah, que l’on doit se permettre
d’embêter notre Marine Nationale. À bon entendeur…
Vendredi 30 juin
Je m’interroge sur la nécessité de
poursuivre ce blog. Ce n’est pas tant par rapport à ce qui y figure déjà que
par rapport à ce que je n’y mentionne pas. Je n’ai jamais prétendu tout dire…
Mais aujourd’hui ?
Un lien vers une vidéo relatant ma lecture
(im)mobile, voir note du 17 mai.
Autrement ? Je relis ce blog. J’élague, j’élague
pas ? Je décide de ne pas virer la citation d’Olivier Py en date du 24
février, malgré sa prise de position écœurante dans l’affaire Handke. Ce n’est
pourtant pas l’envie de censurer les inquisiteurs qui me manque… Je préfère me
souvenir de ma découverte de « La servante », la première pièce de Py
que j’ai lue.
Handke. Une phrase de lui : « Ecrire,
c’est être attentif à la manière dont on vit. »
Lundi 5 juin
Retour à la Demeure du
Chaos dix mois plus
tard (voir ce journal à la date du 11 juillet 2005).
Ce dimanche
était journée portes ouvertes, bref, au lieu de découvrir le lieu en (tout)
petit comité, me voilà au milieu d’une foule… familiale. Et c’est bien la
première fois qu’une pareille ambiance ne m’oppresse pas (je parle de
l'ambiance familiale). Je reste étonné de voir que même les bureaux du groupe
Serveur sont accessibles au grand public (je renverse sans le faire exprès
quelques dossiers fourrés à la hâte derrière une chaise).
Vendredi
prochain sera une journée décisive. Vendredi, tous à 13h30, au palais des 24
colonnes (Place Paul Duquaire) !
Samedi 3 juin
C’est signé de la sœur de Nietzsche, championne toute
catégorie de la trahison, qui n’a pas hésité à offrir la canne de Friedrich à
Hitler !
« À cette époque, il a écrit quelques pages où, en
d’étranges fantaisies, se mêlent la légende de Dionysos-Zagreus, la passion des
Évangiles et ses contemporains les plus proches : le dieu déchiré par ses
ennemis erre, ressuscité, sur les rives du Pô, et voit alors tout ce qu’il a
jamais aimé, ses idéaux, les idéaux du temps présent en général, loin
au-dessous de lui. Ses amis et ses proches sont devenus ses ennemis qui l’ont
mis en pièces. Ces pages sont dirigées contre Richard Wagner, Schopenhauer,
Bismarck, ses plus proches amis : le professeur Overbeck, Peter Gast,
Madame Cosima, mon mari, ma mère et moi… Même dans ces pages, il y a des
passages d’une beauté saisissante, mais dans l’ensemble elles se caractérisent
par un délire maladif. Dans les premières années de la maladie de mon frère,
lorsque nous nourrissions encore l’espoir trompeur qu’il pourrait guérir un
jour, ces feuilles ont été en grande partie détruites. Le cœur aimant et le bon
goût de mon frère auraient été trop gravement blessés si de telles notations
lui étaient un jour tombées sous les yeux. »
Renaud pointe le doigt au bon endroit, là où ça fait mal.
Oui, « VOUS ÊTES ICI, NOUS EN SOMMES BIEN LÀ ».
Mardi 30 mai
Cet
été, je devrais passer quelques jours en Bretagne (Renaud,
y es-tu ?). Détour obligé par le Havre où le sculpteur québécois Michel Goulet vient de faire aboutir son
projet « Voix-Voies » pour lequel il m’a
demandé deux textes très brefs à percer dans ses fameuses chaises (les
lyonnais peuvent déjà découvrir son travail au belvédère Abbé Larue… voir
l’image).
De
nombreux poètes québécois ont été sollicités par Michel Goulet pour ce projet.
Merci à Luc Larochelle qui a soufflé mon nom
quand il s’est agi de donner une, voire même deux chaises à un poète français.
Jeudi 18 mai
Dommage pour les lyonnais(es) qui ont
raté la rencontre avec Fabrice
Melquiot à la bibliothèque de La-Part-Dieu.
Question : les effets secondaires d’une pareille
rencontre durent combien de temps ?
Mercredi 17 mai
Lecture (im)mobile avec
le bureau des (h)auteurs. J’avais deux
contraintes : le sujet du texte à écrire (« c’est ma femme qui
décide »), et le lieu de la lecture à voix haute : dans ma
voiture !
Deux jours plus tôt, lors
d’une expérience spirituelle intense, j’avais ouvert les yeux sur cette
terrible vérité : je partage avec François Hollande les mêmes
initiales !
Fort de cette découverte,
j’ai écrit un texte dans lequel j’incarne François Hollande… en train de donner
sa première leçon de conduite à sa très chère Ségolène. Ce soir, j’ai joué ce texte. Une trentaine de
personnes se sont succédées dans ma voiture. À chaque lecture, une Ségolène
différente à mes côtés. Mon seul regret : n’avoir accueilli aucun élu dans
ma caisse. Je me serais fait encore plus mordant.
Pour finir, Judith,
Leïla, Pierre et moi-même avons partagé la même voiture pour partager nos
textes, entre (h)auteurs.
Dimanche 14 mai
Animation à l’Aleph de mon atelier « Un lieu, un
écrit ». Une belle journée… pour tout le monde, je crois.
Samedi 13 mai
Ce n’est pas la première fois que l’on me
refuse un manuscrit. Ce n’est pas la première fois qu’un ami me refuse un
manuscrit (c’est déjà arrivé avec Pierre-Jean de « La Fosse aux ours », ou avec Renaud… et cela n’a jamais compromis nos
amitiés, car à chaque fois, j’avais droit à un véritable retour sur mon texte,
le plus souvent pertinent, etc.).
Hier, un ami m’a refusé un manuscrit par
le biais d’un courriel de trois lignes. La sécheresse de cette réponse
(Internet n’arrange rien, de ce côté-là) m’a littéralement coupé les jambes. Je
vais attendre que cet ami soit de retour sur Lyon, la semaine prochaine (il
habite à 300 mètres à vol d’oiseau de chez moi !), pour lui faire part de
mon impression. Ne surtout pas répondre par courriel à mon tour.
Jeudi 4 mai 2006
J’ai déniché
les « Écrits corsaires » de Pasolini chez un bouquiniste. À trois
euros. Et je ne les ai pas achetés. Je suis un con.
Pour me consoler, je viens de trouver le blog de Fabrice Melquiot.
Pendant
ce temps là, Peter Handke est censuré au nom des droits
de l’homme et de l’humanisme. On vit une époque formidable. Woody
Allen disait que « La dictature pour un artiste, c’est ferme ta gueule,
et la démocratie, c’est cause toujours ». On voit vers quoi
s’oriente notre société. Demain, elle sera bien propre sur elle et elle puera.
Elfriede
Jelinek (Prix Nobel de littérature il y a
deux ans) se dit « horrifiée » par la décision de
Monsieur Bozonnet, administrateur de la Comédie Française. Il y a de quoi.
Samedi 29 avril
Le week-end dernier, j’ai participé à un marathon d’écriture d’une durée de 42
heures. Un texte inédit ici.
Samedi 15 avril
Fabienne nous parle de Grisélidis.
Mercredi 5 avril
Un message dégueulasse sur mon forum (« Ago-ago » daté
du 31 mars) que je n’ai pas souhaité effacer. J’ai bien fait, la réponse
exemplaire du sieur RV n’a pas tardé.
Les canuts de l’édition existent. Ils bossent sur mon plateau de la Croix-Rousse bien
sûr.
Mercredi 29 mars
Ce week-end, à Lyon, se tient la
seconde édition du festival « Quais du polar ». Rien à rajouter à mon
texte daté du 3 avril 2005 concernant les coulisses de ce festival. Et
aujourd’hui, je trouve dans Lyon-Capitale ce remarquable article signé
Anne-Caroline Jambaud.
« LA MEMOIRE COURTE
Dès sa
2e édition, le festival Quais du polar débaptise le Prix Agostino.
Dégonflés !
L’an dernier, le festival Quais du polar avait
décidé de décerner un prix du polar baptisé prix Albert Agostino parmi une
sélection de polars édités. À l’époque, on avait un peu râlé, arguant que
l’anar Ago aurait sans doute pesté qu’on
colle son nom sur des produits d’édition bien calibrés et sans doute un peu
trop propres sur eux. Mais bon, un an après sa mort, c’était une manière
d’hommage, et ça fait toujours un peu chaud au cœur.
Et puis c’est dans l’esprit gouailleur et
querelleur d’Ago, journaliste claironneur, que l’idée même de ce festival est
née. C’était en 2003, lors de la pose de la plaque Frédéric Dard à la
Croix-Rousse, pendant une discussion entre amateurs éclairés de polar. Le
cabinet du maire Gérard Collomb s’était alors saisi de l’idée de célébrer ce
genre populaire, un brin anar et plutôt de gauche. Malheureusement, l’équipe de
Quais du polar avait fini par liguer contre l’événement les polardeux de la
ville qui, c’est vrai, ne sont pas des faciles.
Aujourd’hui, elle lâche aussi Agostino : dès
la 2e édition, le prix est débaptisé. Le nom d’Albert Agostino
effacé. Le prix s’intitule désormais « prix Quais du polar ». Pure
démarche marketing : le festival a besoin d’attacher son nom au lauréat,
de développer sa « marque ». On parle de « basculer » le
prix Albert Agostino sur le lauréat du concours de la meilleure nouvelle, mais
il n’en est fait mention nulle part. Et puis, ironie du sort, cette nouvelle
sera publiée dans le quotidien gratuit « 20 minutes », alors qu’Ago
vendait son canard au prix fort, celui de son indépendance.
La Ville de Lyon a donc l’hommage bref et la
mémoire courte. Ago était pourtant un fidèle. Fidèle aussi à la ville de Lyon
qu’il a beaucoup détesté parce que tant aimé.
A-C Jambaud »
Vendredi 24 mars
Ma (charmante) voisine m’a informé que,
d’après la Fnac.com, mes ouvrages publiés à la Passe du Vent (en tout cas
« La grande érosion ») seraient « épuisés ». Il n’en est
rien, bien évidemment. La Passe du Vent a récemment changé de distributeur et,
pour la Fnac.com, c’est beaucoup plus simple de déclarer les ouvrages
« épuisés ». Aller chez son libraire préféré et passer commande, cela
reste une solution.
Mardi 21 mars
Printemps. Et pluie sur Thonon-les-bains
où je co-anime un atelier en compagnie du musicien Stéphane Lam
(« irrésumable », tel est l’adjectif qui lui conviendrait le mieux).
Le portable contre mon oreille, sur le
bord d’un lac qui a enfin décidé à se montrer après un épisode nocturne et un
autre brouillardeux, j’apprends la fin de mon aventure avec Lyon-Capitale. Il
me reste quatre « Fantaisies urbaines » sur les bras. Je vous livre
celle-ci :
PLACARD SEDITIEUX
Quand le
lyonnais Henri Béraud (prix Goncourt en 1922, condamné au bagne vingt-trois ans
plus tard) s’est baladé Place Bellecour pour écrire sa « Promenade autour du
cheval de bronze », il n’a guère évoqué le Mac Do où je rédige ces lignes.
On lui pardonnera cet oubli.
Dans ce lieu saturé de graisse et de sucre,
borné WIFI jusque dans les toilettes, je me livre à la moins branchée des
activités. Je me fais du bien. Je bouquine quelques travaux d’historiens, en
parfait autodidacte. Je complète ma cartouchière, tandis qu’au dehors croissent
l’arrogance des puissants et le ressentiment des sans-grades. Je finis mon menu
XL en apprenant qu’à la Libération, chaque lyonnais avait perdu en moyenne dix
kilos. Je découvre qu’à d’autres époques fleurissaient sur les murs de Lyon des
« placards séditieux » signés « Le Povre »
(sic). Je note ce genre de détails, m’amuse à lister ceux de mes contemporains
qui mériteraient de se prendre ce genre de placard en pleine figure.
Je vais débarrasser mon plateau, retourne à
ma place, à ma lecture et à mes « joyeurs d’espée ».
J’apprends qu’en 1909 un des employés de l’usine Berliet de Monplaisir
s’appelait Jules Bonnot. J’espère qu’à SEB, quelqu’un lira ces lignes.
Mes voisines de table causent de la grippe
aviaire et de l’Ain tout en dévorant leurs chicken nuggets. Je continue de me
piquer avec la plume de quelques érudits.
Jean Butin(1) a fait un énorme travail pour
moi. Il a constaté que, sur les centaines de rues lyonnaises, quatorze d’entre
elles perpétuent le souvenir d’une femme. Pas vingt, pas quinze,
quatorze ! « 3 religieuses, 6 bienfaitrices, 3 résistantes, une
aviatrice, et… Juliette Récamier ». Gageons qu’avec une Ségolène Royal
en tête des sondages, les Collombophiles rééquilibreront la balance (mais que
l’on ne compte pas sur eux pour donner à une rue le nom de l’écrivain mentionné
en début de cette Fantaisie).
L’ami Gnafr’ me rejoint, les doigts pleins
de ketchup lors même qu’il n’a pas attaqué son Big Mac. Il me tient un discours
que je résumerai d’un « Pas de Vélo’v pour la banlieue, bien fait pour
vos gueules les pauvres ». Contrairement à lui, je doute que la
frustration occasionnée provoque une nouvelle « Grande Rebeyne »
(du nom de l’un des plus importants soulèvements populaires qu’ait connu la
ville).
Gnafr’ me tend un exemplaire du Progrès. À
l’intérieur, une interview de Gérard Collomb où il est dit qu’il se Pradélise
sans que cela fasse sourciller l’intéressé. Gérard tient plutôt la forme.
Philippe Muray est mort. Lyon-Capitale vient de sauver sa peau. La roue tourne.
Nous vivons à une époque où les duels sont interdits et les menus XXL
autorisés. Préparons-nous à une grande opération de « Vivre
ensemble ».
(1) « Ces lyonnaises qui ont marqué leur temps »,
éditions ELAH
Mardi 14 mars
Si les photos du 24 janvier ne vous ont pas suffi, voici le reportage télé.
Rien à voir : un lien
obligé dont je nourris mon blog avec beaucoup de retard.
Mercredi 8 mars
Ma grand-mère gît en terre picarde. Aux côtés de mon
grand-père, parti quarante ans plus tôt.
Lors de l’enterrement, j’ai fixé la terre (grasse, sombre,
sans doute très riche) comme jamais je ne l’ai fait.
La présence de cette terre était hallucinante.
Jeudi 2 mars
ATELIÉ D’ÈKRITUR (2)
dans le
blockhaus
les
profs se teignent
les
cheveux
en rouge
elles en
éclaboussent
les
copies
qu’elles
corrigent
les
élèves se rongent
les
ongles
mordent
leurs
stylos
lèvent
un doigt
jusqu’à
leur nez
lisent
le
journal
gratuit
ne
lisent pas
les
manuels
scolaires
ne
lisent pas
tout
court
Mercredi 1ier mars
« Expliquons-nous.
La poésie régulière, en effet, est finie.
Elle s’est accomplie avec Victor Hugo, à qui nous sommes en droit de joindre un
aileron sulfureux, Baudelaire, et un bouton de diamant, Mallarmé. Nous avons là
un épilogue historique daté. La forme fixe s’est consommée à sa cote la plus
élevée. Il est désormais impossible de rejoindre cette altitude évanouie. Pour
toute perspective, la forme fixe n’a, depuis cent ans, que sa décroissance.
Occupe-toi de ton minimum. Sans aucune intention moqueuse ou paradoxale je
constate qu’elle ne vit que dans la chanson et qu’elle a Charles Trénet, Léo
Ferré, Claude Nougaro pour ses plus solides amants. »
Audiberti, Dimanche m’attend
Mardi 28 février
CERTITUDES
(atelier d’écriture 1)
je suis debout
ils sont assis
c’est moi l’écrivain
mais c’est eux qui écrivent
c’est eux qui se perdent
au pays de Neverland
m’entendent-ils citer
Rimbaud
Flaubert
Bruce
Lee ?
m’entendent-ils trop parler ?
est-ce que je les gêne
à marcher de long en large
à les inviter à ceci
à les mettre en garde contre
cela
à prétendre sentir la pente de
leur écriture
malgré ma sinusite chronique ?
est-ce que ma voix
mon corps
les gênent pour écrire ?
est-ce l’inverse qui se
produit ?
est-ce le fait qu’ils écrivent
qui m’anime ?
je ne verrai pas la fin de tout
cela
personne ne la verra
le guidon nous sort de la tête
et nous chargeons sur une route
avec laquelle nous finissons
par nous confondre
Vendredi 24 février
« Nous avons remplacé le sublime par l’art au nom
du sublime. Nous avons remplacé l’art par de la culture au nom de l’art. Nous
avons remplacé la culture par du culturel au nom de la culture. Nous avons
remplacé le culturel par de la communication au nom du culturel. Nous avons
remplacé la communication par une tombola au nom de la communication. Et nous
avons remplacé la tombola par la tombola et la tombola par une tombola et la
pensée et la démocratie et le désir par une tombola démocrate, une tombola bien
pensante et une tombola désirante. »
Olivier Py, Epître aux jeunes acteurs pour
que la parole soit rendue à la parole (Actes Sud)
Je viens de
découvrir que l’ami Léon, taxi driver à Montréal, reconduit son blog depuis quelques mois. Suivez le guide… je
sais ce que je lui dois. Lors de ma résidence d’auteur à Montréal il y a 3 ans,
Léon m’a fait découvrir quantité de coins et… d’auteurs (il est également l’un
des meilleurs lecteurs que j’ai rencontrés à ce jour).
Je jure que je n’y suis pour rien !
Vendredi 27 janvier
« Les directeurs de théâtre, les
journalistes, les peintres, les chefs d’orchestre, peuvent tout à leur aise
agiter leurs engagements, leur porte-plume, leur palette et leur bâton, la
bourgeoisie lyonnaise s’en fiche un peu, pourvu que fleurisse l’inventaire, que
l’associé soit roulé, que la fille épouse un fabricant et le fils ne tombe que
des femmes mariées. »
Henri Béraud (en octobre 1913 !).
Toujours sur Béraud, ce portrait signé par son ami Marius
Mermillon (et trouvé dans l’ouvrage « Une histoire de
peinture », éditions Stéphane Bachès) :
« Chaque ville détient ses
personnages falots et glorieux, risibles et haïssables, des Barrès professeurs,
des Mandel conseillers municipaux, des Maurice Rostand poètes, des Georges Boy
croque-morts, des bonhommes médaillés, galonnés, plaqués, dorés, vernis et
tabous pour les citoyens.
Béraud, de tempérament excitable, dressa un
catalogue de ces pingouins lyonnais et les appela un par un, en combats
singuliers. Mais il avait double muscle et cognait sur des toquards. Ses
adversaires prenaient figure de victimes. Pour corser le jeu, il résolut de
cantinelliser son public tout entier. Il l’invita à une conférence : les
Lyonnais considérés comme un jeu de massacre, et il en annonça une
seconde : cafards et cloportes, essai sur la générosité, la cordialité et
la franchise lyonnaise. Le public vint et se divertit, sans se fâcher, une
rigolade de bonne compagnie, discrète sous les mouchoirs. Cela faisait dans la
salle un bruit de petites bêtes écrasées.
Il y avait de quoi dégoûter un belluaire
vindicatif, balayeur d’écurie. Béraud, dégoûté, partit, fit la guerre et ne
revint pas à Lyon. A Paris, il mit bas la veste, enfila les gants de quatre
onces et reprit son entraînement.
(…) Il a distribué quelques rudes horions. Ici même
nous l’avons vu pocher l’œil de Mr Gide, et le temps de compter neuf lignes, on
emporte sur un brancard les restes flasques de Mr Suarès. Pareille infortune
échoit rarement à ses messieurs. Espérons qu’elle se renouvellera. De Lyon, ses
amis suivent les matches. Mon vieux, dit le journaliste qui tire un illustré de
sa poche. J’ai vu sa photo en tenue de combat. On écarte les verres, les têtes
se penchent sur le papier. L’esthète est en garde. Un monocle tache la vaste
rondeur des joues. Mèches raides et sourcils crispés, son regard vise la scène
où doit naître et mourir quelque pièce de Francis de Croisset. Il médite un
brutal direct du corps. Est-ce bien lui ?
Ils le reconnaissent mal. Béraud ne leur apparaît
point tel, lorsque entre deux trains, évadé de Paris, de retour d’Irlande,
d’Italie ou d’Orient, il vient prendre place toute une soirée à la vieille
table. Alors cette moue s’épanouit en un large sourire, ses pommettes roulent
dans cette face de caoutchouc en mille expressions de bonne humeur et de
jovialité. Car il n’est pas de ces jeunes premiers au profil anguleux qui
perdent leur personnalité s’ils sourient ou baissent la paupière. »
Mercredi 25 janvier
TRIOMPHE INTIME
nous posons pour un peintre
dont l’atelier disparaîtra dans un
incendie
pour un photographe qui a oublié
de charger son appareil
pour un voyeur amnésique
pour une caméra reliée
à un centre de contrôle
où tout le monde
même le chien
fait la sieste
Mardi 24 janvier
Le
« Bureau
des (h)auteurs » était au grand complet pour toute une
soirée de déambulation poétique dans une barre H.L.M de La Duchère. Judith,
Valérie et Stéphanie étaient belles. Les garçons ont fait ce qu’ils pouvaient.
Dans
l’encadrure de la porte, Judith Lesur
et Patrick Dubost.
Pour
ma part, j’ai commis une lecture en salle de bain (en guide de rideau de
théâtre, un rideau de douche) suivie d’une autre dans un ascenseur.
Pour
plus de photos, voir ici.
Mardi 17 janvier
Merci à Georges qui a déterré quelques
liens jusqu’à mes « Fantaisies urbaines ».
Les voici (les non-lyonnais peuvent
s’abstenir, sans vouloir fâcher mes amis bretons, parisiens, belges…) :
Une matinée de Gérard Collomb.
Greg le Millionnaire rattrape les balles
Des chauffards notablement connus
Jeudi 12 janvier
Découvert le premier recueil de nouvelles
d’Emmanuelle Urien, jeune auteur très
doué. Ma note de lecture :
« COURT,
NOIR, SANS SUCRE
Recueil
de nouvelles de Emmanuelle Urien
Il en faut peu à Emmanuelle Urien. Donnez-lui… une femme
sur le départ, ou un garçonnet intrigué par le jardin de son voisin, ou encore
un soldat de retour d’une guerre… et faites confiance à l’auteur, à sa science
des détails, à l’extrême précision de son style, pour ouvrir devant vous tout
un monde menacé par le chaos. Autant de situations quotidiennes, connues,
faussement posées, autant de nouvelles dégoupillées, prêtes à...
Emmanuelle Urien sait placer les charges aux bons
endroits, et en toute discrétion. L’air de rien.
Le cadre de l’histoire est-il domestique ? La
sauvagerie peut y surgir, en tout cas l’auteur vous le fera croire/craindre.
Dans la plupart de ses nouvelles, il laisse s’exprimer un personnage (« J’étais
devenu un vilain défaut à moi tout seul »). Mais quel que soit le
procédé narratif qu’il a adopté, on peut être certains que l’auteur nous rendra
vivants et proches les protagonistes de son histoire, que leur sort nous
importera… et que la fin de la nouvelle ne nous laissera pas indemne. Ses
phrases sont à fragmentation.
Parler de ce recueil, c’est avant tout
parler d’écriture. De style. Tant pis pour les amateurs de « Si vous avez
raté le début… », il leur reste la possibilité de s’abonner à Télé 7
Jours.
Le style, donc. Facile de l’évoquer, il suffit de rappeler
la généalogie d’Emmanuelle Urien. Pascal Garnier et Annie Saumont ont eu une
fille… et ils ne lui ont refilé que leurs qualités.
Premier cliché : il paraît que la nouvelle est LE
genre le plus difficile. Peut-être. On s’en fout. Ce qui est certain, c’est que
Emmanuelle Urien y excelle (malgré les innombrables concours auxquels
elle a participé… victorieusement la plupart du temps).
Second cliché : il y aurait une écriture masculine et
une écriture féminine. Comment évacuer ce genre de concept merdique ? En
lisant ce recueil par exemple. Qui remet illico les pendules à l’heure. Il y a
les bons auteurs, et les autres. Emmanuelle Urien est un(e) très bon
auteur(e)1. Tout ce qu’elle écrit s’impose avec une douce
évidence. On appelle cela l’art de la cruauté. E.Urien vous campe un
personnage, une situation en deux lignes : « Pauline fredonne, la
mer qu’on voit danser, un air d’un autre âge que le sien, elle n’a pas
trente ans mais c’est vrai qu’elle fait plus. ». E.Urien, elle aussi, a la
trentaine, et la maîtrise d’écriture qu’elle démontre ne laisse pas de nous
impressionner. Quelques mots lui suffisent pour décrire un hôpital de brousse,
« baraquement de tôles brûlantes qui ne désemplit pas, où la mort
libère plus de lits que la guérison ».
Vous trouvez mes extraits un peu courts ? Voici
comment l’auteur ouvre l’une de ses histoires :
« Je ne vois pas de hache. Ce n’est pas non plus
un couteau qu’elle tiendrait caché sous l’étoffe. Ce n’est pas un poinçon, pas
un poignard, pas une dague. Pas d’arme blanche, rien d’aiguisé, de pointu, de
tranchant. Rien d’aussi froid que du métal, je le jure. S’il y a eu un éclat,
si la lumière s’est éprise de sa main, c’est qu’elle a aimé la laque sur son
ongle, l’opaline ou la nacre accrochée à son poignet, ou même sur le fil d’or
cousu sur sa manche et courant le long du bras. »
Suit une nouvelle ronde de bourreaux et de victimes
qu’Emmanuelle Urien orchestre de main de maître. Il est rare de trouver autant
d’élégance dans des textes aussi noirs (E.Urien, de son vrai nom Emmanuelle
Garnier-Saumont rappelons-le, n’a aucun mérite, c’est génétique).
J’ai lu le recueil d’Emmanuelle Urien, et j’ai été un
lecteur heureux. Ensuite, j’ai relu mon dernier manuscrit, et j’ai réussi à
couper l’équivalent de deux pages. Comme disait ma grand-mère,
« l’émulsion, y’a que ça… ». Je suis un auteur heureux. »
Frédérick
Houdaer
1 :
Les « e » entre parenthèses, c’est pour faire plaisir à mes amis
québécois
« Court,
noir, sans sucre »
publié
aux éditions de « L’être
minuscule »,
2 place
Georges Pompidou 93160 Noisy-le-Grand
124
pages, 11 €
ISBN
2 9525713 0 9
Mardi 10 janvier
Pour les non-lyonnais qui prennent le train en marche et
trouvent l’histoire « Lyon-Capitale vs Gérard Collomb » très
compliquée, je copie-colle cet article paru dans « LE CANARD
ENCHAÎNE » du 4 janvier 2006 :
« UN JOURNAL VICTIME D’UNE CRISE DE MAIRE
Ni
galette des Rois des retraités ni bal des catherinettes : "Lyon Capitale", pour un journal local, s'intéressait plutôt à la
culture. Mais, du haut de ses modestes 15 000 exemplaires, cet hebdo impertinent
n'hésitait pas parfois à humer les arrières-cuisines politiques lyonnaises, à
mettre son grain de sable dans des engrenages bien huilés : l'alliance entre
Charles Millon et le Front national, le job offert par Raymond Barre au bras
droit de Michel Giraud, président de la Région Ile-de-France, au moment où les
juges fouillaient les dossiers des lycées franciliens, et, plus récemment, les
marchés passés par l'actuel maire socialiste de Lyon, Gérard Collomb. Une
curiosité que le maire a interprétée comme une manoeuvre inspirée par le
candidat de droite à sa succession, Dominique Perben, ministre des Transports.
Dernier incident, "Lyon Cap" publiait, début octobre, les confidences d'un ancien
proche de Collomb chargé des appels d'offres publics qui dénonçait des "marchés pipés" dans son dos. C'en était trop. La Ville s'abstient alors
de toute pub dans le journal, soit un manque à gagner de 100 000 euros. Les
nombreux organismes culturels subventionnés par la mairie et la communauté
urbaine sont invités à en faire autant, ainsi que les patrons des grandes
sociétés lyonnaises. Loin de nier, Collomb revendique cette action de
salubrité.
Le 13 décembre, "Lyon Capitale" consacrait sa une à la perquisition menée par la PJ dans
le bureau de Collomb et au siège de plusieurs grandes sociétés. Ce fut son
dernier numéro. Depuis, le nouveau propriétaire (qui a racheté le titre au "Progrès" en juillet dernier) a viré le pédégé fondateur ainsi que
le rédacteur en chef, et l'ensemble de la rédaction est menacé de se retrouver
à l'ANPE. Ces naïfs ont cru que leur journal pouvait être indépendant
politiquement alors qu'il dépendait financièrement d'une collectivité locale.
Le maire de Lyon n'aime Guignol que lorsqu'il reste une marionnette.
A.G. »
Mardi 3 janvier 2006
Lyon-Capitale (episode III)
L’assassinat de Lyon-Capitale se poursuit (voir note du 20
décembre). Ce matin, aucun numéro n’est sorti, la grève a été reprise. Nous
avons débarqué dans les bureaux d’Evolem, la société de Bruno Rousset, où
Philippe Chaslot, rédacteur en chef du journal, était convoqué pour un
entretien de licenciement. Je croyais que les entretiens, c’était pour
embaucher quelqu’un…
Caméras de France 3 et de T.L.M étaient présentes. Elles
n’empêcheront pas le « nettoyage » de se poursuivre.
De source sûre, je sais que mes « Fantaisies
urbaines » ont été lues par les principaux intéressé(e)s, par les
premier(e)s visé(e)s. Je connais la réaction de certain(e)s d’entre eux/elles…
Pour répondre à plusieurs courriels privés envoyés par des
auteurs, j’ai deux fois plus de raisons que l’an dernier d’être blacklisté lors
de la seconde édition de « Quais du polar ». Je ne vois pas pourquoi ils
(les Annie Mesplède et consort) se gêneraient. Voir notes du dimanche 3 avril
2005.
À part cela, petite visite dans les locaux réaménagés de
Terrenoire Editions, à l’autre bout du plateau de la Croix-Rousse. Lionel
(Tran) et cie ont fait un superbe boulot.
Samedi 31 décembre
Marcel Aymé pour finir l’année :
« -
Je commence à comprendre ce que vous appelez confort intellectuel.
-
Ne vous flattez pas. »
Mardi 20 décembre
Lyon-Capitale
(episode II)
« Bonjour.
En
vous remerciant d'avance pour l'intérêt (et le soutien) porté(s) au manifeste
ci-après et en comptant sur votre carnet d'adresses pour le diffuser le plus
largement possible.
Salutations.
La Société Des Rédacteurs de Lyon Capitale.
___________________________
Manifeste pour le respect de
l'indépendance de la presse
___________________________
Le journal Lyon Capitale a sorti
des enquêtes sur des anomalies dans l'attribution des marchés publics du Grand
Lyon.
Depuis lors, des pressions exercées par le maire de Lyon et certains acteurs
économiques concernés, ont eu pour but de déstabiliser le journal.
Résultat : l'actionnaire majoritaire de Lyon Capitale, Bruno Rousset, président
du groupe April, a limogé Jean-Olivier Arfeuillère, P-dg et fondateur du
journal.
Cette éviction s'accompagne de menaces sur les salariés et sur l'avenir du
titre.
Nous signataires de cette pétition, déclarons que :
La liberté de la presse est garantie par la législation française et
européenne.
Notre démocratie a besoin d'une presse indépendante des pouvoirs quels qu'ils
soient.
Il est indispensable que la presse exerce librement des fonctions de
contre-pouvoir.
En conséquence,
- Les pressions exercées par le maire de Lyon, élu de la république et à ce
titre garant de la démocratie et du pluralisme, sont inacceptables.
- Les tentatives de certains dirigeants économiques pour museler la presse sont
inadmissibles.
De telles pratiques sont antirépublicaines et contreviennent gravement à notre
conception de la démocratie et de la liberté d'opinion.
Nous soutenons les salariés de Lyon Capitale dans leur lutte pour
l'indépendance de la presse.
Prénom /
Nom /
Profession /
Ville /
Signature /
___________________________________________
Vous pouvez renvoyer cette
pétition signée avec la
mention « bon pour signature » à :
presse.libre@free.fr
___________________________________________
Rendez-vous sur le http://presse.libre.free.fr
Jeudi 15 décembre
Cela concerne le journal
« Lyon-Capitale » dans lequel j’écris chaque semaine avec la plus
totale des libertés, et ce depuis trois mois.
« LYON-CAPITALE DÉCAPITÉ
La
société des rédacteurs de Lyon Capitale
exige la réintégration de Jean-Olivier Arfeuillère
Ce mardi 13 décembre, le conseil d'administration du journal a révoqué son
président-directeur général, Jean-Olivier Arfeuillère, sous des prétextes qui
ne trompent personne. Depuis plusieurs semaines, des pressions
politico-économiques sont exercées sur Lyon Capitale pour tenter de le
déstabiliser (voir le numéro de cette semaine). La rédaction de Lyon Capitale
reste solidaire de son PDG-fondateur, qui incarne son esprit de liberté et son
indépendance.
Elle exige la réintégration de Jean-Olivier Arfeuillère dans ses fonctions.
La société des rédacteurs de Lyon Capitale (en grève) »
Pour finir, je vous copie-colle un extrait du dernier Lyon-Cap
justement :
« Depuis sa création, notre journal a connu des périodes
de déstabilisations. Et nous avons connu trois maires de Lyon. Mais PENDANT NOS
11 ANS D’EXISTENCE, AUCUN MAIRE N’A PORTÉ ATTEINTE À LYON-CAPITALE COMME GERARD
COLLOMB AUJOURD’HUI, qui oublie les simples règles de la vie démocratique et du
droit de la presse à faire son travail d’information. »
Mardi 13 décembre
Allons bon, voilà que je participe à un nouveau blog !
Jeudi 15 au soir, retrouvons-nous chez
les Ogres Nourris à l’Insouciance Vibrante de l’Art, autrement dit « Onyva » (voir rubrique
« actualité »).
Vendredi 2 décembre
« Bienvenue à Palma »,
le site de l’ami Dominique où l’on retrouve LE plaisir du cinéma. Ou comment
glisser « la lettre au voyant » de Rimbaud dans une critique de
« Dead zone » !
Mercredi 16 novembre
Ces quinze derniers jours, je n’ai pas
changé mes habitudes. Pour cause d’ateliers à animer (entre autres boulots),
j’ai passé beaucoup de temps… à Vénissieux et à Saint-Fons par exemple. Que
dire de ce que j’y ai vu ? Inviter les personnes qui lisent ces lignes à
se reporter à ma note située un peu plus bas, à la date du… 10 octobre !
Samedi 12 novembre
En l’espace de trois jours, j’enchaîne deux salons du
livre : celui d’Aniche (près de Douai) consacré au polar (des ours, des
loups + l’élection de Miss Polar au menu !) et celui de Lyon au milieu de
la Place Bellecour et des cordons de C.R.S.
Ces deux rendez-vous m’ont permis de rencontrer en chair
et en os Renaud Marhic et Christian Cottet-Emard qui ont
l’habitude de hanter ma « toile ».
Vendredi, pour me rendre à Douai, je me
suis Tégévé en première classe. Première classe et première fois de ma vie. Et
alors ? J’ai dormi. Fauteuils confortables, spacieux, visiblement conçus
pour de grosses personnes. Magazine « TGV » à disposition. En Une est
annoncé un dossier « Les dessous de l’édition ». Mieux vaut pioncer
que d’ouvrir ça.
Quand j’émerge, c’est pour filer au wagon-bar et entendre
son tenancier se plaindre :
-
Y’a eu 8 millions de morts pour qu’aujourd’hui, ce soit
férié… et bien ça n’a pas suffi, parce qu’aujourd’hui, je dois bosser. »
J’ai donc passé 24 heures dans le nord de la France… 24
heures qui m’ont fait du bien (mon père et mon grand-père ne sont-ils pas de
Dunkerque ?). Parmi les auteurs invités, j’ai été surpris d’apercevoir
Fajardie (je croyais qu’il ne participait plus à ce genre de manifestation).
Ce festival d’Aniche possède bel et bien une âme (et Roger Facon, son organisateur, n’y
est pas pour rien). Heureux également d’avoir rencontré l’excellent Pascal Françaix (mince, lui aussi en
pince pour Ghelderode, lui aussi est de Aniche comme Roger Facon) et découvert les éditions Octobre derrière
lesquelles se cache Pierre Grimbert.
La
reine était Audrey Françaix. Aucune Miss Polar
ne lui arrivait à la cheville.
Tout de même, de retour en gare de Lyon-Part-Dieu, j’ai
aimé retrouver un soleil même timide.
Ce ne sont plus les chantiers d’écriture qui me manquent.
Vendredi 14 octobre
Avec Fabienne et Sylvie, plusieurs mois durant, je suis allé à la
prison Saint-Paul. Lire des textes. À voix haute. Aujourd’hui, Fabienne lâche
un cri, un texte sur cette
expérience.
Lundi 10 octobre
-
Qu’est-ce que tu écris en ce moment ?
-
Ben… Des préfaces !
Je finirai comme notre bon maire de Lyon, Edouard Herriot…
qui peut se vanter d’être l’auteur de près de 800 préfaces ! Et dans tous
les genres ! Ainsi, il a préfacé un bouquin intitulé « Le
chauffage électrique », un autre consacré à « Du Pont de
Nemours, honnête homme », un troisième évoquant « L'enfer des
bêtes (étude documentaire sur la malfaisance envers les animaux) », un
« Manuel de transports commerciaux et de douane », etc.
Quelques titres encore, pour la bonne bouche :
« Histoire de la boucherie lyonnaise », « L'inlassable
effort des Tchéco-slovaques », « Le Kemalisme »,
« Le petit oeuvre d'amour et gaige d'amytié », sans oublier le fameux « Place aux
vieux ! » signé du Docteur Bidon (je n’invente rien).
En ce qui me concerne, le bilan est plus modeste.
Mais depuis septembre, CINQ livres ont été publiés dont j’ai signé la préface
(éditeurs différents, contenus divers…).
Avant de vous parler de ce qui m’a rempli de colère
ces derniers jours (la censure de l’un de mes textes), je vous copie-colle
l’une de mes préfaces récemment publiées. Elle ouvre le livre « REGARDS
SINGULIERS, VOIX PLURIELLES (Paroles de jeunes des Minguettes)
» publié aux Editions de la Passe du Vent. Pour être plus précis, pour
rajouter un détail piquant, elle suit une première préface signée par André
Gérin, le maire communiste de Vénissieux.
« L’ENTRE-DEUX-PAIX
Une à une, les rencontres de Thierry
Renard qui jalonnent ce livre. Une à une, les pulsations du cœur du poète. Une
à une, les phrases, les bribes de dialogues, les leçons d’intégrité qui
circulent entre les protagonistes de ce livre.
N’oublions pas le sens premier du
serrement de mains. Montrer que l’on n’a pas d’armes. Ensuite ? Découvrir
que chacun a une histoire, et la possibilité de l’assumer, de s’en détacher, de
s’y enfermer, c’est selon.
Thierry Renard opère sur le terrain,
à vif. Il ne fait pas dans la taxidermie (il lui manque quelques diplômes de
sociologie pour cela). Le goupil est un animal injustement décrié. Sa capacité
à l’empathie est sans limite. Il sait suspendre son jugement, même quand on lui
tient des discours non dénués de moraline. Les jeunes qu’il rencontre, qu’il
écoute, ont le mot “ paix ” facile. Certains ont plus souffert d’un
conflit familial que de la guerre qui déchirait leur pays d’origine. Il y a les
mots de la tribu, les non-dits et les silences de la tribu, les non-pardons de
la tribu. Il y a les mots de Thierry Renard qui clarifient et apaisent…
Paradoxalement, il faut une grande vivacité au poète pour parvenir à ce
résultat.
Le jeune Omar cite, et il fait
bien : “ Aime ton ami avec quelques réserves, car il pourrait devenir
ton ennemi ; déteste ton ennemi avec quelques réserves car il pourrait
devenir ton ami ”.
Frédérick Houdaer »
Vénissieux, donc. Cela fait des années que je fréquente
cette ville. Culturellement, il s’y passe bien plus de choses que dans les
cités voisines. L’activité de l’association Pandora n’y est pas pour rien.
À la fin de l’année dernière, j’ai été recruté par
l’équipe municipale des « Fêtes Escales ». Ma mission : animer
des ateliers d’écriture dans divers endroits de Vénissieux (collège Aragon,
usine R.V.I…), et effectuer des lectures poétiques en appartement. Cette
dernière expérience était inédite pour moi. Lire chez les gens, entre leur
canapé et leur poste de télévision… Cela m’a fait redécouvrir le trac !
Le travail que l’on me demandait s’étalait sur plusieurs
mois. Il était payé (une somme forfaitaire), mais il ne s’agissait pas que je
compte mes heures.
Les lectures se sont plutôt bien déroulées. Néanmoins, un
certain nombre de détails m’a vite sauté aux yeux. Quand je les signalais à
Blandine (de Fêtes Escales), elle faisait celle qui n’avait rien entendu ou
envoyait la balle en touche. Pour résumer mon impression naissante : je
n’étais plus poète depuis belle lurette dans cette affaire, je faisais de
l’animation culturelle. Le plus dramatique, c’est l’absence de relais dont nous
avons pâti dans les structures/lieux où je suis intervenu pour les ateliers
d’écriture. Dans la bibliothèque de RVI où j’ai animé des ateliers d’écriture
(fréquentation quasi nulle), je n’ai jamais vu aux murs les affiches annonçant
l’activité.
Quand
je parle d’absence de relais, c’est un euphémisme.
Cette « absence de relais » aurait pu se
comprendre s’il s’était agi de la première édition des « Fêtes Escales ».
Il n’en était rien. J’avais pourtant le sentiment d’essuyer les plâtres à
chaque intervention. Je crois que Florent de Fêtes Escales n’était pas chaud
pour que des animations aient lieu à RVI, il avait tiré les leçons des années
précédentes mais Miss Blandine n’en avait cure, elle s’entêtait.
Moi qui n’ai jamais craint de devoir m’adapter à de
nouveaux terrains, je me suis laissé gagner au fil des mois par un sentiment…
assez lourd.
Plus d’une fois, j’ai eu envie de tout planter là (ce
n’est pas mon genre). D’interrompre ma lecture chez cette dame dont la fille,
enfermée au premier étage, regardait la télé avec le volume à fond. De stopper
le énième atelier d’écriture à RVI où, en dehors de deux-trois personnes
vraiment motivées, je ne rencontrais qu’indifférence voire hostilité.
Je n’ai rien stoppé. J’ai poursuivi, fini chaque travail
entamé.
ET J’AI EU TORT.
Il y a eu cette journée « festive » dans le parc
public de la ville, annoncée à grand renfort d’affiches quatre par trois. Les
groupes de musique qui s’y produisaient avaient leur nom écrit en plus ou moins
gros, les deux poètes de service chargés de faire une énième lecture publique
n’étaient même pas cités.
Au terme de tous les ateliers d’écriture dont j’ai eu la
responsabilité, il s’est agi de sortir un petit recueil des textes écrits par
les (rares) participants (heureusement, leur motivation compensait leur faible
nombre). Blandine m’a demandé un texte pour une préface. L’occasion pour moi de
me reposer de véritables questions sur la posture de l’animateur de l’atelier,
sur ce qui me motive. L’occasion également de parler de la banlieue et des
jeunes que j’y rencontre (un ascenseur social en panne ? Quel
ascenseur ? Il n’y a plus d’ascenseur dans la cage, il n’y a plus que la cage),
de dresser un tableau qui n’a certainement rien de rose même si je le voulais
traversé par une énergie certaine, de poursuivre en quelque sorte un autre
texte que j’avais écrit (voir plus haut, la préface à « REGARDS SINGULIERS,
VOIX PLURIELLES (Paroles de jeunes des Minguettes) » ).
Et Miss Blandine, qui n’avait pas écouté les remarques que
j’avais pu lui faire (trop gentiment) ces derniers mois, a pris connaissance de
ce texte puis décidé qu’il ne passerait pas. S’il lui fallait un texte de
catéchisme de gauche, il ne fallait pas me le commander !
Voici donc cette (très courte) préface qui ne sera jamais
préface :
« Jodorowsky écrivait dans les
années 70 : “ Le jour viendra où les jeunes se trouveront face au
dilemme : poseur de bombes ou conteur ? ”.
Nous y sommes. La prospective de
Jodorowsky n’était en rien exagérée. Maintenant, que voulons-nous ? Quelle
stratégie sommes-nous prêts à poser ? Je ne méconnais pas l’enjeu qu’il y
a dans un atelier d’écriture. Je ne méconnais ni la beauté de ce mot « atelier »,
ni l’ambiguïté du rôle de l’animateur, sorte de pompier pyromane.
Je ne maîtrise pas l’avenir. Je sais
juste que cela n’a rien à voir avec la politique. Que cela à TOUT à voir avec
la politique.
Frédérick
Houdaer »
D’accord, Jodorowsky omet une troisième possibilité pour
tous les jeunes, la catégorie qui attirera le plus grand nombre d’entre
eux : celle des zombis consommateurs. J’aurais dû la mentionner dans la
préface que j’ai proposée. Ce n’est pas cela qui l’aurait protégée de la
censure, qui l’aurait sauvée aux yeux des autruches.
Histoire de finir sur une touche plus positive, de saluer
de belles personnes croisées lors de ces « Fêtes Escales », un coucou
à Abdelwahed A., Younes B., Gilles R., Sophie S. et son frère qui tous (à titre
divers) se sont impliqués dans ce marathon. J’ai été heureux de croiser leur
route (j’omets de mentionner deux ou trois autres personnes dont j’ai oublié le
prénom, mais elles savent que je pense à elles).
Lundi 3 octobre
Je le relis régulièrement.
Extrait :
13
juillet. - Un homme, une caisse à outils. Antoine est arrivé ce matin :
une vraie plume mais ni maigre ni chétif. Énergique, vif. En un rien de temps,
il s’est fabriqué une sorte d’établi le long de la palissade. Son
travail : tresser les ferrailles, semelles, piliers, linteaux, préparer
les coffrages. Il a du métier, comme on dit. Et des mains de sourcier, de
derviche ; ça va vite, ça s’éclaire d’un coup. Ses outils : un jeu de
griffes pour tordre les fers, des pinces coupantes, une petite et une grosse
cisaille.
Dans
l’après-midi, Ahmed et moi l’avons aidé à plier les barres de 16, grosses comme
le pouce. Pourquoi, soudain, en plein effort, ce rire fou, ce rire qui nous
montait des mains comme un oiseau grimpeur ? Impossible de continuer,
c’était là, dans l’air, à hauteur de visages : une aile.
Ascendante,
jusqu’au soir.
Thierry Metz, Le
journal d’un manœuvre, Editions L’arpenteur
Lundi 19 septembre
L’événement valait bien cette
première : de l’image sur mon blog en souvenir de notre performance !
Un grand merci à Karelle Prugnaud
(comédienne), à Bertrand Louis (vidéaste) et à Bob X (musicien). Sans oublier
Audrey, notre poisson-pilote !
Et est-ce que je porte bien le masque ?
vendredi 16 septembre
c’est
l’année du coq
je
n’y peux rien
c’est
mon année
qu’on
se le dise
qu’on
le colporte
jusqu’à
ce que l’information me revienne
aux oreilles
Jeudi 15 septembre
Comme prévu, je suis sur une création dans le cadre du festival
Up Date. Quatre journées de folie,
d’urgence, etc. Je pensais m’en tirer avec une lecture-performance dans un coin
de la scène, tandis que le reste du groupe (une comédienne, un vidéaste et un
musicien) attirerait l’attention du public.
Au lieu de cela… demain soir, vendredi 16, à 20h00, sur le
parking du 8/9 quai Arloing, vous pourrez me voir jouer la comédie (avec puis
sans masque), chanter, danser… C’est gratuit, et les responsables sont à
chercher du côté de Là Hors De.
Un jour, il faudra que j’apprenne à répondre
« non » aux propositions de certaines comédiennes.
Mardi 6 septembre
L’ami Michel (Thion) ouvre son site,
tandis que dans le reste du monde on recycle à tout va.
Vendredi 26 août
Résumé de cet été : des vacances de pauvres qui ont
fini par coûter cher (problèmes de bagnole, problèmes de garagiste, four et
frigo et téléphone à changer, etc.).
Souvenir de ma lecture quotidienne de Var-Matin. Quand je
tombais sur un article consacré à Sarkozy bras dessus bras dessous avec les
pilotes de Canadair, j’avais l’impression de dénicher un article de gauche. Je
vous laisse deviner le reste du canard, les sujets et leur traitement.
Mercredi 24 août
Croisez les doigts, allumez des cierges, faites des
prières, improvisez des danses chamaniques pour mon recueil de nouvelles
« TIRS TENDUS ». Pour l’heure, il m’a valu les compliments d’un
Pascal Garnier et une belle lettre des éditions Le Dilettante. Je ne peux pas
m’en contenter. D’où de nouveaux rendez-vous avec la photocopieuse, mes visites
au bureau de poste près de la place Flammarion…
« Tirs tendus » n’a rien à voir avec une
collection de fonds de tiroir. Cela fait plus de deux ans que je suis dessus.
Je l’ai fait passer de 300 à 170 pages (et non l’inverse). La couleur de ces
nouvelles est noire, mais l’ensemble est parcouru par un véritable arc
électrique.
À
suivre…
Vous aimez la nouvelle (en écrire, en lire) ? Vous
pouvez vous inscrire au groupe de discussion « Nouvelles » (de
nombreux auteurs & lecteurs y participent, dont Emmanuelle Urien, Renaud Marhic,
Eric Dejaeger, etc.)
E-mail du groupe : groupenouvelles@yahoogroupes.fr
Inscriptions : groupenouvelles-subscribe@yahoogroupes.fr
Jean-Jacques
Nuel nous présente Léon Bloy.
Vendredi 19 août
Comme tous les vrais méchants,
il n’était pas mort, pas vraiment mort, et il ressuscite.
Lundi 8 août
Antoine Blondin :
« (…) Mon père a eu toute sa vie une envie : celle d’écrire un livre.
Il ne l’a jamais fait. Quand il est mort, pour la première fois j’ai essayé moi
aussi d’écrire un livre. Pas à sa place. Mais si lui en avait publié un, je
n’aurais jamais écrit le moindre livre. Quant à ma mère, elle était issue de la
grande bourgeoisie. Son aïeul s’appelait Casimir-Perier. Dans la vie, il
faisait président de la République. Six mois en 1894. Après quoi il a donné sa
démission pour aller claquer tout son argent avec les admirables putes de
l’époque.
Pierre Assouline : C’est quand même un drôle de destin pour un
Président.
Antoine Blondin : Oui, mais c’est peut-être
comme ça qu’on obtient un écrivain quarante ans après. »
Extrait
de « Le flâneur de la rive gauche », entretiens Blondin/Assouline
Je ne sais plus si je l’ai déjà mentionné sur ce blog,
mais vous trouverez ici quelques inédits de Richard Brautigan (traduit par
le sieur Eric Dejaeger).
Après Toulon, retour à Lyon. Dans mes toilettes, ce poster
de l’Europe des 25. Les noms des villes y sont marquées suivant différentes
polices. Les villes comptant de 100000 à 500000 habitants ont droit à des
lettres de mêmes grosseurs. Bref, Toulon et Lyon ont exactement la même taille
sur cette carte (cachant un mur en piteux état).
Jeudi 4 août
Relire sur une plage Varoise « Les aventures d’Unlenspiegel »
comme on s’injecterait un contre-poison (Eric Dejaeger m’avait déjà parlé de
son auteur Charles de Coster). Dans le ciel, un
ballet de Canadairs. Non loin de mon sable, au Pradet, tout flambe, y compris
un terrain miné depuis la première guerre mondiale où les pompiers ne peuvent
intervenir.
Dimanche 31 juillet
En guise de carte postale toulonnaise, cet extrait de mon
polar (inédit) « TRACEUSES » qui se déroule… devinez où.
« Midi à
l’horloge de la gare. Façades noircies par la pollution comme par un monstrueux
fusain. Parfois, quelques tâches de rouge ayant viré au rose, des fringues qui
sèchent aux balustrades, couleurs passées au soleil. Un, dix, cent volets
fermés laissent filtrer vers l’extérieur les lumières inquiétantes de postes de
télévision. Chaque pâté d’immeuble sert de coffrage à une centrale nucléaire en
plein accident Tchernobyl.
Marion
avance. Marche. Trace. La laideur comme un feu d’artifice permanent. Fausse
blonde à l’âge indéterminé, Cine Sex Video, fausse blonde mangeant pizza,
Elegance Canine, fausse blonde portant de vraies chaînes en or, Parfumerie
Sandy, fausse blonde avec un méchant coquard, cinoche à la programmation 100%
américaine, fausse blonde engueulant une autre fausse blonde, aloès albinos,
fausse blonde sortant d’un hammam, plaque commémorative « Membres de
l’Eglise Réformée de France morts pour la Patrie », fausse blonde crachant
dans une fontaine à sec, bagarre dans le local des Associations des Harkis du
Var, fausse blonde s’arrachant la peau bronzée de son bras droit contre le
tronc d’un palmier, des fringues impossibles, toute une mode vestimentaire
exhibant des zones érogènes parfaitement cramées, fausse brune… »
Vendredi 29 juillet
“ À l’école primaire, quand j’avais
sept ans, il m’est arrivé un incident étrange. À la suite d’une insolation,
j’ai perdu la mémoire. Je suis resté pendant six mois en état de choc, ne me
souvenant plus que d’une grande lumière, puis je suis brusquement redevenu
normal. Pendant toute cette période, on m’avait mis dans une section spéciale
de mon école, réservée aux élèves déficients mentaux. Nous étions huit, et
devions porter un uniforme noir, alors que les élèves normaux étaient habillés
en blanc. Quand je me suis comme réveillé, on m’a redonné l’uniforme blanc, et
les élèves considérés comme débiles m’ont demandé : “ Mais qu’est-ce que tu
fais là, habillé en blanc comme tous ces cons ? ”.
Hugo Pratt (extrait de son
autobiographie “ Le désir d’être inutile ”)
Mardi 26 juillet
Trouvé dans la dernière lettre de Persona, ce remarquable
extrait :
« Dario
Fo ne fait pas œuvre d’historien, mais il se sert de l’histoire pour montrer
concrètement par le théâtre la nécessité de la réinterpréter sans
relâche : édifiée le plus souvent par les érudits de la bourgeoisie,
l’histoire a besoin d’être réinventée et retournée afin de servir les luttes
présentes. Mais cette ré-appropriation, pour restituer au peuple la mémoire de
ses luttes, doit se garder de concurrencer l’histoire officielle par une
« contre-histoire » tout aussi dogmatique qui se présenterait sous la
forme d’une leçon édifiante, illustrant et célébrant la marche continue et
assurée vers le succès des « organisations responsables ». Dario Fo
ne se réfère à l’histoire que pour retrouver des formes concrètes de
protestation, de subversion, de révolte ou pour montrer les conditions
particulières dans lesquelles furent inventées des luttes et transmis le savoir
qui transforme l’oppression en insurrection. Ce que la culture populaire peut
enseigner, ce n’est pas seulement une « contre-histoire », mais
surtout le moyen d’inventer aujourd’hui encore des pratiques de résistance et
de révolte. Retrouver cette culture c’est attiser le goût de la ruse et de la
fantaisie, et par là continuer à divulguer ces pratiques et à en prolonger la
portée »
in le métier d’acteur,
paradoxe du théâtre politique de José Guinot et François Ribes
Lundi 25 juillet
Je m’estiv’aille jusqu’à Toulon
où un sacré bonhomme vient de mourir. Je
devrais fêter mon 36ème anniversaire sur une aire d’autoroute ().
Autrement, avant de partir en vacances,
un site à visiter.
Et
les propos d’un sinologue, François Julien :
« En Europe, nous avons
politiquement conquis le droit aux vacances, mais en avons-nous jamais conçu la
notion ? (…) Partir en vacances, c’est cela : laisser à nouveau jouer, par-delà
le clivage entre corps et esprit, une vitalité débarrassée de toute excitation
fébrile. L’expérience est commune – je la partage avec les Chinois – mais voyez
comme la pensée européenne reste un peu gourde pour s’en saisir. Descartes ou
Kant ont bien approché l’idée, le premier lorsqu’il recommande de savoir "
ne s’occuper qu’à imiter ceux qui, en regardant la verdeur d’un bois, les
couleurs d’une fleur, le vol d’un oiseau, et telles choses qui ne requièrent
aucune attention, se persuadent qu’ils ne pensent à rien. " " Ce qui
", martèle-t-il, " n’est pas perdre son temps. " Mais sur ce
" penser à rien " vient mourir sa pensée. »
Vendredi 22 juillet
« J’écris sur les tables de cafés, parce que je ne saurais
me passer longtemps du visage et de la voix humaine (…) j’écris dans les salles
de cafés ainsi que j’écrivais jadis dans les wagons de chemins de fer, pour ne
pas être dupe de créatures imaginaires, pour retrouver d’un regard jeté sur
l’inconnu qui passe, la juste mesure de la joie et de la douleur. »
Bernanos, préface aux Grands cimetières
sous la lune
Jeudi 21 juillet
Pour les Rhône-Alpins : chez votre
marchand de journaux, le dernier numéro de LYON-DECOUVERTE spécial polar. 15
grands faits divers lyonnais racontés par des écrivains. Un texte de Charles
Juliet consacré au Juge Fayard ! Pouy évoque l’assassinat du Président Carnot à Lyon,
au XIXe siècle. Quant à moi, je m’attaque à l’Affaire du Courrier de Lyon.
Pour la séance photo liée à la parution
dans cette revue, voir la note du lundi 11 juillet.
Lundi 18 juillet
C’est ma fête… et pourtant, je quitte
Avignon (trois courtes journées passées au festival). Par miracle, j’ai trouvé
une place pour le (trop ?) fameux « Je
suis sang » de Jan Fabre.
Vendredi 15 juillet
Jeudi 14 juillet
Lundi 11 juillet
Tout commence par une séance photo
normale. Éric Soudan, photographe pour Lyon-Découverte, souhaite me tirer le
portrait dans un cadre intéressant. Il passe me prendre en scooter et m’emmène
au Musée automobile de la Rochetaillée. Là, je prends la pose au fond de deux
voitures dont un taxi de la Marne. Le musée étant officiellement fermé, nous
l’avons pour nous tout seul. Nous nous attardons. Nous examinons la monstrueuse
voiture de Hitler, ou celle qui a servi à Jean-Paul II pour faire deux fois le
tour du stade de Gerland lors de son passage à Lyon, dans les années 80. Cette
dernière affiche 250 kilomètres au compteur !
Nous remontons sur le scooter… Éric, au
lieu de me ramener directement à la Croix-Rousse, me dit qu’il a « un
truc » à me montrer. Et le voilà qui me conduit jusqu’à LA DEMEURE DU CHAOS (je ne l’avais
vu qu’au travers de quelques reportages dans la presse, jusqu’à présent). Voilà
qu’Éric pousse son scooter jusque devant les grilles de la propriété, voilà que
ces grilles s’ouvrent car mon photographe-chauffeur vient de saluer de loin une
connaissance… Thierry Ehrmann, le
Maître des lieux, qui nous accueille avec la plus grande gentillesse… et nous
fait visiter son chantier, son lieu de travail et son lieu de vie (les bureaux
du groupe Serveur sont cachés sous le sol). Le site bénéficie d’une autonomie
totale en matière d’électricité, d’eau, etc. L’un des toits, en cuivre, est
farci de capteurs. Un autre est décoré/flanqué d’une énorme météorite. Tout est
taggué de rouge et de noir.
L’homme fait montre d’un bel enthousiasme en nous montrant
l’ancien temple protestant qu’il est en train de mettre à jour dans ce qui
reste d’un potager, ou les nouveaux portraits géants peints sur la façade. De
quoi ravir les voisins (Ben laden, Ratzinger du temps des jeunesses
hitlériennes, « d’après une photo repêchée dans la mémoire de la banque de
données du Vatican ! » nous explique notre guide).
Nous voyons l’ancien maire du village, qui fut l’un des
farouches opposants au projet, venir saluer Thierry
Ehrmann et lui dire « bravo ». Éric n’en croit pas ses
oreilles, ni ses yeux.
Deux molosses dignes des Baskerville viennent réclamer
leur lot de caresses (non, je ne charge pas le tableau, je n’ai pas parlé de
l’hélicoptère fracassé, racheté en l’état, et posé au milieu de la cour, ni de
l’épée de maçon de Thierry Ehrmann plantée
dans l’un des murs extérieurs, ni de la salamandre…).
Quelques heures plus tard, je lirai cette phrase de Nimier
dans un texte consacré à la thébaïde de Kléber Haedens : « Deux
chiens d’une philosophie profonde hument et gardent cette maison. »
Jeudi 7 juillet
Soldes ! – 30 % sur les
baskets ! Va pour cette paire d’Adidas.
À
la caisse, je découvre que les godasses que j’ai choisies ne sont rien moins
que des « Adidas Esoteric » (sic !).
Mercredi 6 juillet
D’autres publications à
venir : une nouvelle dans le numéro estival de LYON-DECOUVERTE, un long
poème dans le numéro 4 de la revue « ON ».
Enfin,
cerise sur le gâteau, à compter de la rentrée de septembre, je tiendrai une
chronique hebdomadaire dans « Lyon-Capitale ».
Mercredi 29 juin
Sans conteste, une
des meilleures revues du moment. Je fignole un texte pour son
quatrième numéro titré « A quoi bon la fiction ? »
Un premier coup de dent de la part du Vampire Actif : en souvenir
d’une belle journée passée au Château de mon webmaster (moi, quand j’embauche
un type pour me construire mon site, je recrute un châtelain… et je ne le paye
pas !). Des images du récital Brassens, avec Jean à la guitare (qui fut
mon patron au Foyer Notre-Dame des Sans-Abris il y a dix ans !), quelques
vues sur les toiles de Roland Dauxois, et un défilé de slameurs (avec un « m »
ou deux « m » ?).
Mardi 28 juin
Où il est
intelligemment question de Manchette…
Je poursuis ma route jusqu’à Villard-les-Dombes où j’anime un atelier
d’écriture dans une résidence de personnes âgées depuis plusieurs semaines. À
vol d’oiseau, la résidence n’est qu’à quelques centaines de mètres du… parc
ornithologique.
Fil rouge de l’atelier : le pain. Aujourd’hui, une mamie de 95 ans
écrit ses textes sans aide puis les lit elle-même à voix haute. Elle retrouve
sans difficulté le nom du premier boulanger qu’elle a connu, enfant.
Toutes ces personnes que je rencontre ont grandi, vécu, vieilli en
milieu rural. Je ne risque pas de les confondre avec les mamies et les papis
que j’ai connus comme veilleur de nuit dans la banlieue lyonnaise.
Mercredi 15 juin
Croyances
et techniques pour la prose moderne
Evergreen Review, vol 2, n.8, 1959
Jack Kerouac
Liste des points essentiels:
1. Carnets secrets, couverts de gribouillis, et pages follement
dactylographiées, pour votre propre plaisir
2. Soumis à tout, ouvert, à l'écoute
3. N'essayez jamais de vous soûler en-dehors de chez vous
4. Soyez amoureux de votre vie
5. Ce que vous ressentez trouvera sa propre forme
6. Soyez fou, soyez un saint abruti de l'esprit
7. Soufflez aussi profondément que vous souhaitez souffler
8. Ecrivez ce que vous voulez sans fond depuis le fin fond de l'esprit
9. Les visions indicibles de l'individu
10. Pas de temps pour la poésie, mais exactement ce qui est
11. Des tics visionnaires tremblant dans la poitrine
12. Rêvant en transe d'un objet se trouvant devant vous
13. Eliminez l'inhibition littéraire, grammaticale et syntaxique
14. Comme Proust, soyez à la recherche du joint perdu
15. Racontez la véritable histoire du monde dans un monologue intérieur
16. Le joyau, centre d'intérêt, est l'œil à l'intérieur de l'œil
17. Ecrivez pour vous dans le souvenir et l'émerveillement
18. Travaillez à partir du centre de votre oeil, en vous baignant dans l'océan
du langage
19. Acceptez la perte comme définitive
20. Croyez en le contour sacré de la vie
21. Luttez pour esquisser le courant qui est intact dans l'esprit
22. Ne pensez pas aux mots quand vous vous arrêtez mais pour mieux voir l'image
23. Prenez note de chaque jour la date blasonnée dans votre matin
24. Pas de peur ou de honte dans la dignité de votre expérience, langage et
savoir
25. Ecrivez de façon que le monde lise, et voie les images exactes que vous
avez en tête
26. Livrefilm est le film écrit, la forme américaine visuelle
27. Eloge du caractère dans la solitude inhumaine et glacée
28. Composer follement, de façon indisciplinée, pure, venant de dessous, plus
c'est cinglé, mieux c'est
29. On est constamment un Génie
30. Scénariste-Metteur en scène de films Terrestres Sponsorisés et Financés par
les Anges au Paradis
Mardi 14 juin
HISTOIRE DE MES LIVRES
(Premier épisode)
(éditions du Serpent à Plumes, Collection Serpent Noir,
neuf euros,
ISBN 2 84261 114 4) :
Ecrit en
deux mois, durant l’été 1997 (j’ai 28 ans).
Mon cinquième roman écrit (les quatre premiers pas publiés
parce que pas publiables).
Mon premier « roman noir ». Je me passe cette commande
après avoir constaté la multiplication des collections noires chez les
éditeurs. Résultat : un roman plus personnel que les précédents, malgré
l’abandon de la première personne du singulier et de ma veine auto-fictionnesque.
Le thème principal de « L’idiot n°2 » n’a rien
d’original, mais me tient à cœur : l’enfermement et la libération, dans
tous les sens que l’on peut donner à ces mots. La prison est au centre de
l’histoire.
Quatrième
de couve copiée-collée :
« Dosto, vingt ans, est
incarcéré à Shitland. Dans sa cellule, Abdel-Sammy, un sage, et Richard
Sebasteni, « le nouveau Dreyfus ».
Dosto philosophe, lit tout ce
qu’il peut trouver, abhore la télévision, s’essaye au bouddhisme zen. Il aime
Fanny Charpentois qui le lui rend très bien. M.Charpentois, le père, est quant
à lui une institution : politicien véreux et fascisant de Lyon, impliqué
dans divers trafics, il viole sa fille tous les soirs depuis son entrée en
sixième.
Rapide, déjanté, nerveux, un texte dérangeant et
atypique dans la lignée du meilleur néo-polar à la Fajardie. »
De la pure prose d’éditeur, comme dirait Polac. À signaler
que dans cette même quatrième de couv’, il est question de ma (brève)
correspondance avec Frédéric Dard ainsi que de mes huit échecs consécutifs au
permis de conduire (ce dernier détail, c’est moi qui ai tenu à le faire
figurer).
Pour écrire ce roman sur une période relativement courte,
je prends soin de quitter la plupart des associations dont je fais partie. En
deux mois d’écriture, je perds sept kilos.
J’envoie le manuscrit à une trentaine d’éditeurs. Pour
dégoter leurs adresses, j’abuse de la patience de Mme et Mr Péju. Dans leur
librairie La Proue déjà très encombrée, je bloque tout le monde (« Je peux
jeter un coup d’œil dans votre botin d’éditeurs, oui ? Histoire de
recopier quelques coordonnées… J’en ai juste pour une petite heure, je
m’installe, mais pas pour longtemps, etc… »).
Le roman est pris par le Serpent à Plumes et sort en mars
1999. Atterrit dans la vitrine de La
Proue.
Beaucoup de presse (parisienne et Rhône-Alpine). Des
chiffres : une quarantaine d’articles. Dans deux articles sur trois, le
journaliste n’a pas été fichu d’écrire mon nom ou mon prénom sans l’écorcher
(je n’ose pas imaginer ce qu’a vécu Daeninckx à ses débuts !).
« Etrange roman noir, qui
a du style à l’évidence et qui fait froid dans le dos. » (Cathy
Bouvard, Lyon-Capitale)
L’article le plus intéressant est signé Pascale Vannereux
dans le défunt mensuel lyonnais « Nota Bene ».
Cathy Bouvard me racontera une anecdote amusante par la
suite. Durant l’été 99, elle est partie du côté de l’Himalaya. Au pied d’une
grande montagne (forcément), elle trouve un bouquiniste (on reconnaît la
droguée de livres). Pratiquement que des bouquins en anglais. Une petite caisse
de bouquins en français. Et au milieu, mon « Idiot ». Quand elle m’a
raconté ça, Cathy ignorait tout ce qui pouvait me lier à cette région du monde…
où je n’ai jamais mis les pieds.
Si j’additionne la totalité des droits d’auteurs perçus
depuis la sortie du livre, je n’obtiens pas la somme de 2000 francs/300 euros
nets (en comptant les 0 francs d’à-valoir). L’une des rares obligations d’un
éditeur est d’envoyer un relevé de compte annuel à ses auteurs (où il peut
avancer les chiffres les plus fantaisistes). Au Serpent, ils ne l’ont fait que
pendant deux années consécutives. Le livre continue à se vendre à ce jour (je
signe une dizaine d’Idiot à chaque salon du livre auquel je peux participer).
L’extrême violence de « L’idiot n°2 » m’a valu
d’être rangé dans la même case que Virginie Despentes par plusieurs critiques.
C’est ce qui m’amènera à pousser le bouchon complètement dans l’autre sens avec
mon livre suivant (« La Grande Érosion »).
À suivre…
Mardi 7 juin
Lundi
dernier, j’anime un atelier d’écriture à la prison avec Marie C., prof de
français. Elle me montre un gars dans un couloir, me souffle « je te
raconterai plus tard », et m’invite à aller lui serrer la main. Je sais
que l’homme ne va pas participer à l’atelier, je suis un peu surpris mais ne pose
pas de question.
Deux
heures plus tard, Marie m’explique : « pas un méchant, un escroc. Il
se faisait passer pour un prêtre, il a marié des gens, et tout… »
Je
reste devant Marie la bouche ouverte. Lui demande le nom du gars. C’est bien
lui.
J’explique
à Marie qui n’a pas lu « Je viendrai comme un voleur », qui ne se
rend pas compte de l’énormité de la coïncidence :
-
J’ai écrit tout un bouquin autour de ce type, autour de ce fait-divers. Je sais
que des faux curés, il y en a plusieurs qui sillonnent la province française,
mais c’est bien de lui dont je me suis inspiré. Et tout à l’heure, l’air de
rien, tu me l’as présenté, tu m’as invité à lui serrer la main !
Enorme
bévue-malentendu dont je suis seul responsable, concernant mon texte daté du 27
mai (et surtout le titre à la con que je lui avais rajouté). Pour plus de
détails, voir le forum et ma réponse à Eric Dejaeger (courriels intitulés
« petit avis »).
Cendrars
capable de parler d’un “ anarchiste de Barcelone ” comme d’un être
“ vindicatif et cruel. Il avait une bouche de tortionnaire et
découvrait ses canines quand il souriait ” (in “ L’homme
foudroyé ”). Comme on est loin des Kenloacheries juste bonnes à faire
mouiller le petit bonhomme de Télérama !
magie pas perdue pour tout le
monde
vengeance encore tiède
train qui arrive à l’heure
pour l’homme sans montre
mais qui l’emmène dans la mauvaise
direction
j’écris cela
est-ce que je prétends
connaître
la bonne direction
pour qui que ce soit ?
mon éditeur mange du chorizo
mon éditeur est aussi un poète
comme moi
il fait avec son corps
avec sa voix
comme moi
il lui arrive de bien se
débrouiller
comme moi
il s’en sort parfois d’extrême
justesse
je nous souhaite de faire
de vieux os
lui
continue de frayer avec les
fantômes des « morts trop jeunes »
qu’il les chasse
ou qu’il relise plus attentivement
les manuels
Lautréamont n’est pas mort à 27
ans
mais à 77
Rimbaud n’est pas mort à 37 ans
mais à 70
et tous deux étaient chinois
pour ne prendre que leur exemple
je crois avoir convaincu mon
éditeur
quand je le vois brûler ses
papiers d’identité
jeter sa montre
son portable
tout ce qui l’obligeait à porter
le fardeau de l’heure
le mensonge des dates
mon éditeur va faire de vieux os
moi aussi
Dimanche 22 mai
laisser le temps
aux choses
au café
à ma réputation
de se faire
à mon pull
à ma réputation
de se défaire
au répondeur
de rembobiner sa
cassette
au virus
de se télécharger
à l’éditeur
d’envoyer sa
non-réponse
au refrain stupide
de sortir de mon crâne
ne rien chasser
ne rien précipiter
tout au plus
incliner du bon côté
la tête
et
la tête
et le corps
puis
le corps
et les ailes
puis
les ailes
haaaaa
allouette
je
te plumerai
allouuuetteu
Vendredi 20 mai
Un homme qui n’est pas forcément celui que
l’on croit.
Jeudi 19 mai
Une mauvaise nouvelle qui a mis du temps à
me parvenir.
Mercredi 18 mai
Très bons textes de Fabienne Swiatly à lire ici.
on raconte quantité de
choses
sur le compte du fils
Einstein
on dit qu’il est
devenu fou
qu’il n’a pas supporté
d’être le rejeton
d’un génie qui savait
tirer une langue de berger allemand
on exagère
Franck
je l’ai rencontré
son épaule droite
était un Lego rouge
d’une belle dimension
sa tête ressemblait à
celle d’un Big Jim
décapité
après qu’on lui ait
fait jouer
le rôle de Louis XVI
un magnifique
contre-emploi
sur sa tête
trônait le scalp
renversé d’un Playmobil
comme une petite
couronne
le fils Einstein était
d’un commerce agréable
mais sans plus
il était aussi
partiellement articulé
sans vouloir me
montrer méchant
je dois bien
reconnaître
qu’il n’avait pas
inventé le fil à couper le beurre
on raconte quantité de
choses
sur le compte des fils
de Gandhi
et caetera
« Affranchir les grands conflits humains de
l'interprétation naïve du combat entre le bien et le mal, les comprendre sous
l'éclairage de la tragédie, fut une immense performance de l'esprit; elle fit
apparaître la relativité fatale des vérités humaines; elle fit ressentir le
besoin de rendre justice à l'ennemi. Mais la vitalité du manichéisme moral est
invincible: je me souviens d'une adaptation d'Antigone que j'ai vue à Prague
aussitôt après la guerre; tuant le tragique dans la tragédie, son auteur
faisait de Créon un odieux fasciste qui écrasait une héroïne de la liberté.
De telles actualisations politiques d'Antigone ont été
très en vogue après la Seconde Guerre mondiale. Hitler avait apporté non
seulement d'indicibles horreurs à l'Europe mais il l'avait spoliée de son sens
du tragique. A l'instar du combat contre le nazisme, toute l'histoire politique
contemporaine serait dès lors vue et vécue comme un combat du bien contre le
mal. Les guerres, les guerres civiles, les révolutions, les contre-révolutions,
les luttes nationales, les révoltes et leur répression ont été chassées du
territoire du tragique et expédiées sous l'autorité de juges avides de
châtiment. Est-ce une régression? Une rechute au stade pré-tragique de
l'humanité? Mais en ce cas, qui a régressé? L'Histoire elle-même, usurpée par
des criminels? Ou notre façon de comprendre l'Histoire? Je me dis souvent: le
tragique nous a abandonnés; et là est, peut-être, le vrai châtiment. »
Le
rideau de Milan Kundera. Gallimard.
JEUDI 12 MAI
SOIRÉE TÉLÉ (« Le
loup-garou de Paris »)
j’écris ces phrases
pendant que mes amis
rigolent grassement
devant la télé où
Julie Delpy se
transforme en loup-garou
c’est bien dommage
ce joli corps qui se
couvre de poils
les ongles qui
s’allongent à vue d’œil
ne me dérangent pas
mais les poils qui
émergent
de cette poitrine si
gracieuse
comme si elle était
transpercée de fils de fer
non vraiment
cela me donne plus
envie de pleurer que de rire
je me contiens
je suis un homme qui
passe la soirée
au milieu d’autres
hommes
l’un d’eux cherche à
me rassurer
Julie Delpy a trouvé
là un vrai rôle de composition
me dit-il
personnellement
j’aurais préféré la
voir dans la peau de Mata-Hari
plutôt que dans celle
d’un loup-garou
le film de ce soir est
censé se dérouler à Paris
à voir la façon dont
l’on nous cache la nudité de l’actrice
il est américain
Julie exceptée
c’est mon poème
j’ai le droit de
l’appeler Julie
Julie exceptée
disais-je
il n’y a pas un acteur
pour sauver l’autre dans ce film
et ceux qui les
doublent en français ne sont guère meilleurs
aussi
je donne raison à
Julie de se transformer
en monstre pour
bouffer tout ce petit
monde parisien
j’ai fait plusieurs
salons du livre
porte de Versailles
et des loups-garous
j’en ai croisé
quelques uns
mais
mon témoignage n’est pas pour intéresser mes amis
Mercredi 11 mai
Il aurait 101 ans aujourd’hui.
Rien que pour cette phrase : « Je suis un homme qui fait attention à tout, et d’abord à l’attention. »
le peuple
j’y reviens
du verbe
“ reviendre ”
le peuple
j’en viens
le peuple
j’en suis revenu
les élites maintenant
pourquoi sont-elles au
pluriel celles-là ?
le peuple
les élites
je fous tout ça dans
le même sac
s’il vous plaît Madame
où puis-je trouver
le fleuve le plus
près ?
oui
c’est pour ce sac
il me faut un fleuve
très profond
avec un courant très
violent
pensez à mon dos
Madame
aidez-moi à le
soulager de son fardeau
tenez
si vous pouviez me
donner la direction du Saint-Laurent
voilà un fleuve de
belle taille qui ferait mon affaire
mais si vous n’avez
que le Rhône à m’indiquer
va pour le Rhône
Mercredi 5 mai
Quelques différents avec les quatre (et
non les trois) personnes qui font vivre le blog mentionné juste en-dessous.
Dimanche 1ier mai
Pour info : naissance d’un blog lyonnais et polémique .
À suivre…
Vendredi 29 avril
Hier, j’ai fini d’animer pour Aleph le stage « écrire la nouvelle
noire » (quatre journées pleines). Un bon groupe, huit personnes qui n’ont
pas craint de se jeter à l’eau.
Ce matin, le théâtre des Asphodèles. Cet
après-midi, la prison Saint-Paul.
Jeudi 21
avril
Avoir accepté ces textes même pas finis
que les un(e)s et les autres m’ont demandé de lire (des ami-e-s trop
paresseux-ses pour proposer une fin à leur texte, aussi insatisfaisante
soit-elle), cela prouve à quel point j’ai pu me manquer de respect ces derniers
temps.
Lundi 18
avril
LAISSEZ VENIR À MOI
LES PETITS ANIMAUX
le chat va-t-il
mourir ?
dans la famille
on le craint
on l’espère
on a besoin de se sentir
soulagé
on ignore ce qu’il a
attrapé
ou ce qui lui manque
il fait peine à voir
avec son arrière-train
bloqué
on parle de guérir
l’animal
de le soulager
d’une façon ou d’une
autre
quelqu’un
-moi-
commence même à
chercher un terrain
où l’on pourrait
l’enterrer
un lundi
c’est le miracle
l’animal se porte
comme un charme
s’il ne bouge plus
c’est parce qu’il fixe
une proie derrière la vitre
sur une branche
en contre-jour
un oiseau se
recroqueville
et se transforme en un
énorme bourgeon
quand il explose
il disparaît purement
et simplement
et ne laisse derrière
lui que le fruit invisible
de son envol
Samedi 16
avril
Un (double) CD : l’Anthologie Céline
Sur le disque, un sticker signé Albert Paraz :
« … Voici un événement !
Privez-vous de vinasse, de tabac et de femmes mais achetez ce disque… Vous
n’aurez jamais rien entendu de si beau, de si puissant, de si lyrique, de si
simple, de si poignant, de si neuf, de si marrant, de si profond, de si
terrible. On sent vibrer la démarche assurée des grands textes
classiques. Pas un mot de trop. »
Céline, donc :
« Celui qui parle de l’avenir est
un coquin. »
« Et puis d’abord on ne devrait
jamais écouter les femmes qui ne sont pas belles, elles ne peuvent dire que des
bêtises. »
« L’école doit devenir magique ou
disparaître, bagne figé. »
« Je donnerai tout Baudelaire
pour une nageuse olympique. »
« -Ah ! Ferdinand… Tant que
vous vivrez, vous irez entre les jambes des femmes demander le secret du
monde ! »
DERAIN
faire des kilomètres
pour voir ce tableau
arrivé devant
faire craquer son cou
le parquet du musée
sa mémoire
entamer une danse
autour du gardien
comme Bruce Lee
chassant l’air
autour de Chuck Norris
jusqu’à ce que
l’adversaire s’effondre
mort d’asphyxie
choir soi-même
sur une banquette rouge musée
relire la biographie du peintre
et ne pas croire en son décès
Mercredi 13 avril
je
croise Novarina au Mac’Do
Valère
Novarina
il
cherche le distributeur de pailles
je ne
prends pas le temps
d’échanger
avec lui
de lui
faire part de ma surprise
ma
copine attend que je lui ramène son menu XL
elle a
un appétit de louve
Dimanche 10
avril
Un blog à la tonalité très juste, « Tu écris toujours ? » ou
le feuilleton quotidien d’un écrivain en 2005. Sans aigreur, mais avec
précision et humour, que demander de plus ?
Samedi 9
avril
« Pour saluer Giono » de Pierre
Magnan
Extraits :
« -
Il faudrait qu’on aille demander un article à Giono.
-
- Tu le
connais Giono ?
-
- Non.
C’est faux. Giono nous le voyons tous les jours déambuler par
Manosque, allant à la poste ou s’installant au café-glacier sur la terrasse
pour contempler d’un œil inexpressif l’immensité de ce qu’il fomente. L’œil
bleu de Giono, principale caractéristique de son visage, est comme celui des
menons cornus des grands troupeaux. Nous le savons déjà très bien pour l’avoir
si souvent contemplé à la dérobée : vide, vacant, anodin, ne voyant volontairement
personne mais voyant tout. Toute sa vie, Giono promènera par Manosque ce regard
objectif mais qui trie ce qu’il veut du spectacle du monde. Un jour, il me
citera cette phrase du peintre Paul Laurens qui le dessine tout
entier : « Aujourd’hui, je ne vois que les cravates ». »
« Giono
s’avançait (…). Mais le bruit qu’il faisait en écartant les feuilles mortes
était insolite. Mon regard s’arrêta à ses pieds. Il portait d’admirables
chaussures cramoisies resplendissantes de cire transparente comme les meubles
d’autrefois. Seulement ce n’était pas des chaussures. Je pensais aussitôt aux
poulaines du Xvème siècle qui figuraient sur les illustrations des contes de
fées, mais ce n’était pas non plus cela. Ces chaussures d’une longueur
démesurée n’avaient pas de semelles. C’est ce qui produisait ce bruit insolite
parmi les feuilles mortes. Elles étaient faites d’un seul ensemble de cuir
embouti et sans couture apparente. Mais ce qu’elles avaient de plus étrange, de
plus déroutant pour un enfant comme moi qui vivait dans la plus banale des
médiocrités, c’était leur forme : au lieu d’être bien à plat au ras du sol
et de se terminer là en un pointu vaguement arrondi comme tous les souliers
bons et mauvais que j’avais vus jusqu’ici, soudain elles rebiquaient du bout,
elles se recourbaient en langue de belle-mère, elles s’enroulaient sur
elles-mêmes pour s’achever en une spirale impertinente en corne de bélier qui
défiait l’utilité et la raison. (…)
Ces chaussures que portait Giono vers mil neuf cent trente-trois, trente-quatre,
m’ont valu le scepticisme de tous. Pourtant, j’ai parlé à leur propriétaire,
bien plus tard, de ces poulaines recourbés, objet de mon premier émoi pour lui.
Il n’a pas hésité une seconde :
-
- Mais
oui ! Tu te le rappelles ? C’étaient des mowglis du Tibet !
Alexandra David-Neel les avait donnés à Maria Borrely qui m’en avait fait
cadeau. Malheureusement ils étaient conçus uniquement pour marcher sur les
bouses de yack. Tu sais naturellement qu’au Tibet, les bouses de yack sont si nombreuses
qu’on n’y touche pas terre. Malheureusement ici, entre les cailloux de mon
chemin et l’asphalte du boulevard de la
Plaine, il n’y a pas de place pour des bouses de yack. Au bout de quinze jours,
mes mowglis étaient fichus. Ce qui explique que tu sois le seul à les avoir
remarqués.
Les spécialistes de Giono ont toujours prétendu que lorsque celui-ci
donnait un tel luxe de détails, c’est qu’il mentait à tout va. Voire…
Lorsque (…) je parlais à mon ami Jacques Michel de ces mirobolantes
poulaines que j’avais vues en sa compagnie, il eut ce rire amusé et un peu
insultant (…) « Ou tu es fondu, ou tu inventes, ou tu veux te faire
remarquer. »
Je n’insistai pas. Mais je suis têtu, précis et obstiné. Tel jour de
1982 où nous passions à cet endroit où Giono m’était apparu avec ces poulaines,
je (…) fis confidence à Aline, sa fille, de ces premiers émois d’un enfant de
13 ans devant la magnificence du poète mis en gloire par ces chaussures
sacrées. Elle s’écria :
- Mais qu’est-ce que tu racontes ? Mais tu es encore plus menteur
que mon père ! Papa n’a jamais porté de telles chaussures ! Et il n’a
jamais rencontré Alexandra David-Neel ! »
« Il me lut de cinq à huit heures du soir,
un bon tiers de La Chartreuse de Parme. Il était dans un état d’enthousiasme
indescriptible.
Il s’interrompait de temps à autre pour me faire partager ses état
d’âme :
- Tu comprends, je me suis dit : Mais
qu’est-ce que tu fais, salaud, à écrire des livres que tu sais déjà
faire ? À te salir avec l’époque ? Attaque-toi un peu maintenant aux
livres que tu ne crois pas savoir écrire ! Et puis (…) ne crains pas
d’utiliser ces imparfaits du subjonctif que tu croyais indigne de toi !
Ils te donneront ce que tu ne peux atteindre avec aucun autre temps :
l’insolence !
Ici sans doute se laissait-il emporter par un regret furtif, car je ne
sache pas que ni avant ni depuis il ait jamais beaucoup utilisé ce mode ni ce
temps (…).
En me reconduisant, comme à l’ordinaire, la main sur mon épaule il me
dit encore :
-
- Et ce
qu’il y a de plus prodigieux, c’est qu’il n’y a pas de chartreuse à
Parme ! Tu comprends ? À partir de là tout est permis et, tu vas
voir, je vais tout me permettre ! »
Vendredi 8 avril
Courriel
de Jean-Jacques Reboux (réexpédié par un copain auteur) intéressant à plus
d’un titre :
« Bonjour à toutes et tous,
Certain(e)s d’entre vous me connaissent
bien, d’autres un peu, d’autres pas du tout, qui doivent se demander comment
diable leur @dresse électronique a-t-elle bien pu atterrir dans un ordinateur
situé de l’autre côté de la lune! Non, non, il ne s’agit nullement d’une
attaque des extraterrestres!!…Comme il est écrit ci-après, je suis en train de
monter une maison d’édition dénommée APRES LA LUNE, qui démarrera en février
2006, et je lance une souscription en complément du capital social de ma SARL,
en cours de formation. Le montant de la souscription (close le 30 octobre 2005)
est de 60 euros. Si ce genre de projet vous intéresse, les lignes qui suivent
(garanties sans virus) vous diront tout sur ma petite entreprise. Dans le cas
contraire, pardon pour le dérangement. Plutôt que de mettre ce texte en PJ –
les trois-quarts du temps impossible à ouvrir par le commun des internautes,
Mac, PC, bidule… –, je l’ai mis à la suite. Un dossier “papier”, plus copieux,
plus lisible et plus précis, avec des chiffres, des projets de couvertures, est
également disponible : envoi par la Poste sur simple demande. Merci de votre
attention.
Cordialement.
Jean-Jacques Reboux
Après la Lune
26 rue Pétrelle
75009 Paris
08.74.59.70.39 (prix d’un
appel local)
apreslalune@free.fr
En 2006, toutes les maîtresses
seront en maillot de bain. (la rumeur)
POUR COMMENCER, QUELQUES HISTOIRES
“PERSONNELLES”…
1984. J’écris mes deux
premiers romans (ce sont des choses qui arrivent). 1992. Après 8 années de tentatives
infructueuses auprès des éditeurs, je monte les éditions Canaille. Malgré ma
totale méconnaissance du métier d’éditeur, grâce à une bonne dose
d’acharnement, la maison survit et finit par se faire une place en librairie et
dans le cœur des lecteurs. 22 livres paraissent en 4 ans. 1996. Grâce au succès
de la collection “Le Poulpe”, Canaille intègre les éditions Baleine, qui me
salarient. 40 titres en trois ans. Parallèlement, je publie dans une autre collection les 3 premiers romans de Yasmina
KHADRA, écrivain algérien qui a, depuis, fait son chemin. 1998. Le Poulpe
s’enrhume. Baleine boit la tasse. Licenciement économique, chômage, etc.
2000-2001. Tandis que Folio réédite 3 de mes romans, Flammarion édite (et
équarrit) “C’est à cause des poules”, roman écrit sur commande ; les
éditions de l’Aube publient (et exécutent) le feuilleton Moulard ; sur la
lancée, Le Masque édite (et massacre, à la hachette) “Pourquoi j’ai tué
Laetitia Remington”. Désarroi, désillusions, paranoïa, difficile d’être un
paysan mayennais à St-Germain-des-Prés !
2004. Après une énième
mésaventure éditoriale chez un éditeur dont je tairai le nom par charité chrétienne, ayant
constaté que nombre de mes petits camarades se plaignaient des drôles de zèbres
que sont parfois les éditeurs, et riche de ces six années d’expérience (mais
les poches vides), après avoir vécu quatre ans durant, jusqu’à la nausée,
d’ateliers d’écriture et ayant par ailleurs renoncé à proposer mes services aux
maisons d’édition, j’ai décidé, avec quelques complices, de créer ma propre
entreprise, en tenant compte des expériences passées. Évidemment, ce type de
projet nécessite audace, générosité, utopie. Mais comme le disait si bien
Sénèque: “Ce n’est pas parce que c’est difficile que nous n’osons pas. C’est parce
que nous n’osons pas que c’est difficile.” CQFD. C’est pourquoi la maison
d’édition a été baptisée Après la Lune. Elle démarrera ses activités en mars
2006 et publiera 15 à 20 livres par an environ. Trois collections sont prévues.
1°) LA MAÎTRESSE EN MAILLOT
DE BAIN. La collection des PETITS ARRANGEMENTS AVEC L’ENFANCE. Des textes
courts, plus propices à l’envolée lyrique qu’à la plongée introspective,
s’appuyant sur l’instantané d’un souvenir, à partir duquel se racontera, qui un
fantasme de môme, qui un rêve de gosse, un acte fondateur de l’enfance, une
cassure secrète… La Maîtresse en maillot de bain s’adresse à tous les publics.
Parce que les histoires qui s’ouvrent grâce au sésame “quand j’étais petit”
intéressent toutes les générations. Elle se propose de décliner une anthologie
thématique, à laquelle ont été conviés des écrivains, chanteurs, comédiens…
mais aussi des personnages historiques. La MMB permettra à nos contemporains de
tenter de comprendre pourquoi des individus aussi différents que Freud, Jeanne
d’Arc, Louise Michel, Jésus, se sont lancés à l’assaut de l’inconscient, de
l’envahisseur anglais, de l’oppresseur versaillais ou de la Galilée ! Sigmund
FREUD ouvrira le ban dès mars 2006. Mais d’abord, place aux vivants ! Les
premiers à avoir répondu présent : Marie DESPLECHIN, François MOREL,
Yasmina KHADRA, René FRÉGNI, Patrick CHAMOISEAU, Hervé JAOUEN, Marc VILLARD,
Lilas NORD, Jean-Pierre ANDREVON, Hervé PRUDON, Tito TOPIN, Christian RAUTH,
Hervé CLAUDE… Sous réserve : Pierre PELOT, Martin WINCKLER, François
REYNAERT.
La MMB, ce sont
des bouquins pas chers (6 €, poche, couvertures couleur), qu’on pourra
offrir à ses enfants, parents, amis. Des livres qui intéresseront aussi bien
les lecteurs assidus que les gens qui lisent jamais. Première salve de 4
titres en mars 2006 (Desplechin, Khadra, Jaouen, Freud), avec un présentoir,
afin que les livres ne soient pas noyés dans les rayons de la littérature
générale.
2°) LA VIE SUR MARS. C’est
le pari de la “littérature généreuse”. Une ligne éditoriale sinueuse et
escarpée, où les textes atypiques, OVNI littéraires, seront les bienvenus.
Grand format. 4 à 5 livres par an. Premiers titres : Sylvie COHEN,
Dernier combat; Chawki AMARI, Duel en solitaire; Pierre FILOCHE, Méchant tango;
Jean-Jacques REBOUX, De Gaulle, Van Gogh, ma femme et moi.
3°) LUNES BLAFARDES. Format
semi-poche. 8 à 10 €. 6 livres par an. Polars et romans noirs. Premiers
titres : Olivier THIÉBAUT, Enquête d’un père; Sylvie ROUCH, Corps morts; Catherine FRADIER, Légitime colère;
Jean-Jacques REBOUX, Le syndrome de Groucho. Comme je vous l’ai dit, je
travaille à la création d’une SARL, dans laquelle j’aurai le statut de gérant.
Mes besoins de départ s’élèvent à 60.000 €, seuil nécessaire pour ne pas
être tributaire d’une trésorerie assujettie aux ventes en librairie et assurer
sans trop d’angoisse les 6 premiers mois d’activité. Cette somme prend en
considération les charges de fonctionnement, le fonds de roulement et le
paiement de mes six premiers mois de salaire (au SMIC) à partir de janvier
2006. Une vingtaine de personnes se sont déjà associées à ce projet en
souscrivant des parts de la SARL. Une bonne partie de la somme nécessaire est
donc réunie. Mais ce n’est pas suffisant. C’est pourquoi, j’ai décidé de
lancer, en complément du capital social de la SARL, une souscription.
Si vous souhaitez y
participer, il vous suffit d’envoyer un chèque de 60€ (à l’ordre de J.-J.
Reboux) à l’adresse suivante : APRES LA LUNE 26 rue Pétrelle 75009 PARIS en
précisant vos nom, prénom, adresse (ainsi que votre courriel si vous souhaitez
recevoir la future lettre d’information des éditions).
Si vous souhaitez que votre chèque soit
encaissé à une date ultérieure – au plus tard le 31 octobre 2005 –, merci de le
préciser. En contrepartie, vous recevrez nos 9 premiers livres : 4 “MMB” à
6 € (Desplechin, Khadra, Jaouen, Freud), 3 “Lunes blafardes” à 8 €, 1 “Vie sur
mars” à 14 € (soit un total de 62 €). En outre, vous recevrez un cadeau de
saison, au choix: la MMB du Petit Jésus (parution Noël 2006), ou celle de
François Mitterrand (le 28 octobre 2006, on commémorera ses 90 ans, Après la
Lune publiera à cette occasion le carnet intime secret de Tonton en culottes
courtes.).
Je vous remercie d’avance
de l’accueil que vous ferez à ce courriel et vous adresse mon salut le plus
cordial.
Jean-Jacques Reboux »
Jeudi 7
avril
Merci
à l’association Page Blanche de m’avoir fait passer ce message :
Message des Amis de Joseph Delteil:
« La
Tuilerie de Massane va-t-elle disparaître ?...Nous venons d’apprendre qu’un
promoteur immobilier serait sur le point d’acheter La Tuilerie de Massane (près
de Montpellier) pour la raser et construire des appartements. Le Maire de Grabels (vice président de l’Agglomération
montpelliéraine) semble se désintéresser du projet de conservation et de
restauration de la demeure de Joseph Delteil. Il faut que les deux présidents
de la Région et du Département interviennent rapidement
pour envisager une autre destinée à cette « métairie à vins » qui respectera la mémoire de l’écrivain
vigneron de Massane. Pour accompagner notre projet (conservation, restauration,
fonctionnement de ce lieu de mémoire) que nous allons prochainement soumettre
aux responsables politiques, nous avons décidé de lancer un appel urgent à tous
les delteilliens de France et d’ailleurs afin que le « poids » des signatures
incite nos élus à trouver une solution qui nous convienne. Nous attendons un
millier de signatures au moins qui donneront force à notre projet. Il suffit
simplement d’envoyer un courrier précisant le(s) nom(s) prénom(s) adresse(s) du
(ou des) signataire(s) à l’adresse suivante: Jean-Paul COURT, 29 Rue du Château
34790 Grabels ou un courriel à jeanpaulcourt@neuf.fr ou
massane@josephdelteil.org »
Rappel: du
2 au 10 juin, La Jeanne de J.Delteil au TNP de Villeurbanne.
Tel
04 78 03 30 00
Lundi 4 avril
Suite du feuilleton « Quais du
polar » :
Mon texte « Quais du
polar ou Si vous raté le début » (voir plus bas) a circulé. Il a été bien
reçu. D’abord, par la première concernée, la responsable politique dont il est
question (très « politique », et très peu « responsable »).
Un colis dans ma boîte aux lettres. J’attends d’être
remonté chez moi pour l’ouvrir. Tandis que je déchire son emballage et découvre
le dernier livre que l’ami Pascal
Garnier m’envoie, j’entends une femme s’étrangler sur mon
répondeur (la fameuse responsable politique) « Je ne suis pas du genre
à tendre l’autre joue, vous verrez quand… ». Elle n’a pas de chance,
la bande de mon répondeur lui coupe la parole au beau milieu de sa menace. Au
moment où cela devenait le plus intéressant.
Je pose l’ouvrage de Pascal (« Flux », chez
Zulma) sur mon ordinateur. Je ne suis pas sans ami(e). Ni sans ennemi(e). Ni
sans solitude. De quoi me plaindrais-je ? Est-ce qu’un type qui écrit a
besoin d’autre chose ?
J’ouvre mon autre boîte aux lettres (sur Internet) : 62 messages
depuis hier (dont 20 spams).
Sur ma table, le manuscrit d’un gros roman qui attend
d’être réécrit de la première à la dernière page. Heureusement, il ne s’agit
pas d’un polar. De ce côté là, quelque chose me dit que quelques portes
(vermoulues) se sont fermées.
Il y a ces phrases de Jean-Louis Murat (extraites d’une
interview) que j’ai recopiées il y a quelques mois : « Quand je
dis ce que je pense, je mets un pied dans la beauté, le territoire que je veux
habiter. »
Dimanche 3
avril
QUAIS
DU POLAR ou « Si vous avez raté le début »
Pour
planter le décor, je copie-colle un extrait de l’article paru dans le journal
« Lyon-Capitale » il y a 15 jours :
« SERIE
NOIRE POUR QUAIS DU POLAR
Démissions
en série, menaces de procès et de boycott… En coulisses, la première édition du
festival Quai des polars semble réunir tous les ingrédients d’un bon polar. (…)
L’idée
de ce festival du polar est née il y a 2 ans, lors de la pose de la plaque
Frédéric Dard à la Croix-Rousse, d’une discussion entre Annie Mesplède, alors
attachée de presse du maire de Lyon, Albert Agostino, journaliste claironneur,
et quelques amateurs éclairés du roman noir.
(…) La
ville abrite, comme n’importe où ailleurs, quelques auteurs et de grands
lecteurs de polars qui, pendant 20 ans, se sont approvisionnés en petits noirs
à Choc Corridor, librairie lyonnaise spécialisée tenue par Jacky Dugrand.
Pourtant,
en moins de 18 mois, cette petite assise locale a volé en éclats et,
aujourd’hui, le petit monde du polar lyonnais est à couteaux tirés. Après
s’être investis pendant un an dans le projet du festival, des auteurs lyonnais
comme Frédérick Houdaer et Gérard Jouannet ne veulent plus en entendre parler.
Gérard Jouannet, alias Alix Clémence, est même parti avec la propriété
intellectuelle du titre initial de la manifestation, Métropolar, et a pris un
avocat pour réclamer ce qu’il estime être son dû pour ses mois de travail. La
compagnie du théâtre du Radeau, chargée d’écrire une parodie de procès, lui a
emboîté le pas. Si 11 libraires s’associent, Alain Léger d’ « A plus
d’un titre » -ancien organisateur du salon du polar à Grenoble- refuse de
participer à l’événement « par principe : on ne spolie pas des gens
de leur travail. Un événement qui démarre comme ça, ce n’est ni très sérieux ni
élégant. »
Appelé
à la rescousse fin novembre 2004, Jacky Dugrand, las de jouer les cautions
littéraires et d’essayer de remonter une histoire sur un contentieux non réglé,
a démissionné il y a moins d’un mois. (…) »
Voilà.
Vous venez de voir le film de ces derniers mois en accéléré. Qui a parlé de
« Clochemerle-sur-Rhône » ?
Pour
répondre à certains amis, j’étais RAYÉ de la liste des 50 auteurs invités bien
avant la parution de cet article. Ça se passe comme ça à Lyon, Capitale des
Trois Gaules puis de rien du tout.
Manquent
de nombreux détails dans l’article. C’est Gérard Jouannet, le concepteur de Métropolar,
qui m’a fait monter dans le train (en mai 2004). Et introduit à l’Hôtel de
ville (plus tard). Où j’ai été bien reçu. Tellement bien que l’on a fini par me
proposer le fauteuil de Gérard. J’avais le bon profil (incontestablement, ce
salon du noir n’était pas mon bébé, j’étais malléable).
Pas
l’intention de jouer au martyr (surtout de crainte que l’on ne me colle une
« cause » sur le dos). Ni de jouer à l’incorruptible (la proposition
qui m’a été faite, je l’ai perçue comme aussi « inacceptable
qu’inratable », ce sont les mots qui me sont venus à l’esprit sur le coup).
J’ai essayé de mettre tout le monde autour de la même table. Gérard a sans
doute été trop gentil. La Mairie, elle, a été parfaitement salope. Retorse de
bout en bout. D’une certaine façon, c’est elle qui m’a aidé à prendre ma
décision. Et à rester au côté de G.Jouannet.
Premier
constat : une mairie de gauche, ça sait moins facilement virer un type
qu’une mairie de droite, ça prend plus de biais, de détour, et au bout du
compte, ça se montre infiniment plus lâche et cruel.
Le
projet élaboré par Gérard ? Vous le retrouvez point par point dans le
programme final. Et à ma connaissance, personne ne remet en cause son honnêteté
(je parle de celle de Gérard).
Il y a
une longue malédiction qui pèse sur tout salon du livre se montant à Lyon, à ce
qu’il paraît. La question est « croyons-nous dans les
malédictions ?». Moi pas. Pas à celle-la. Mais à l’incompétence répétée de
certains membres de cette municipalité, sûrement. La preuve en est la poursuite
des embûches qu’a rencontrées sur son chemin le projet « festival du
polar » après l’éviction injustifiable de Gérard Jouannet (et n’en
déplaise à Jacky, son successeur malheureux, ces nouveaux contretemps ne sont
pas les résultats d’une cabale souterraine, concoctée par quelques aigris au
fin fond d’une traboule). Pour ma part, du mois de décembre à février, je m’en
suis tenu à une simple ligne de conduite « Je ne dépenserai plus un gramme
d’énergie sur ce projet, même pas pour en dire du mal ». Je n’avais pas
envie de mettre dans le même sac tout le personnel de l’Hôtel de ville. Le
pouvoir de nuisance n’est pas une forme de pouvoir qui m’excite. Quand on me
posait des questions au sujet de ce salon du noir bien mal parti, je me
contentais le plus souvent d’arborer un sourire las… et je crois que c’était le
pire commentaire que je pouvais faire. Quand des amis auteurs ayant reçu une
invitation de la mairie me téléphonaient pour obtenir plus de renseignements et
savoir sur quel pied danser, je répondais (à peu près) : « si
vous êtes invités, vous serez sans doute bien reçu, et ça nous donnera
l’occasion de nous revoir dans ma ville. Point barre. »
Retour à l’hôtel de ville.
J’y ai rencontré d’authentiques lecteurs. Quelques uns. Le pouvoir, ce n’est
pas eux qui l’ont. Ils sont l’enjoliveur de la cinquième roue du carrosse. Je
ne leur jette pas la pierre (quand je traite un type de « lecteur »,
c’est le plus beau compliment qui puisse sortir de ma bouche). Je préfère ma
place à la leur, je préfère aller animer des ateliers d’écriture en prison ou
dans des bahuts de banlieue (mais je ne voudrais pas trop passer pour un type
de gôche, aussi je précise bien ce point important : je ne suis de gôche
que lorsque j’anime des ateliers d’écriture… Comprenne qui voudra).
Et maintenant ? Pas l’intention de
m’enterrer comme auteur le temps de ce salon. D’où une signature sauvage sur le
stand d’un libraire ami. Nul besoin d’avoir son nom écrit en lettres d’or sur
le programme officiel pour cela.
Salutation
aux ami(e)s
"Travaille dans ton désordre au lieu de jouer dans
leur programme".
Christian Dotremont
Mardi 29
mars
Avec François Barcelo,
nous descendons dans la Drôme jusqu’à la maison-musée (invisible de la route)
de Cécile Philippe. Quand je parle de
« maison-musée », je n’exagère pas. Dans ce chalet monté comme un
Lego (les poutres sont arrivés de Finlande, chacune numérotée pour que l’on
sache les emboîter sans vis ni clou dans le bon ordre, sauf que les étiquettes
se sont décollées durant le transport), se sont accumulés les œuvres de
plasticien achetées par Cécile(1) durant sa carrière de journaliste. Sans compter
les artistes qui sont venus ici pour peindre la plupart de ses portes (de Jim Léon à Mignot).
Nous parlons littérature, Montréal
(Cécile y a également effectué une résidence d’auteur et a pris l’habitude d’y
vivre six mois par an), frelons (qui lui posent des problèmes sur son terrain
drômois et composent le pire de mes cauchemars d’enfance depuis le jour où j’ai
été coursé par tout un essaim, plus « Orphelin de Perdide » que moi,
tu meurs !), manuscrits de François (en exclu mondiale, j’ai lu et
commenté les deux derniers : « Pompes Funèbres » et
« Bossalo »), Calaferte
(que Cécile a bien connu), Chantal Pelletier (sa résidence
d’auteur à Montréal est plus récente)…
Avec François, nous allons visiter le Palais Idéal du Facteur Cheval à
Hauterives.
Enfant (j’habitais dans le nord de la
France), j’étais un inconditionnel du Facteur. À mes yeux, il était l’artiste
idéal. Quand j’ai visité une première fois son Palais, âgé de 15 ans, la
désillusion a été rude. Vingt ans plus tard, j’y retourne. Je me surprends à
être ému. Quand un autodidacte rencontre un autre autodidacte…
Cécile nous parle du reportage qu’elle a
voulu consacrer au Facteur Cheval il y a quelques années. Bien sûr que de son
vivant, tous ses proches l’ont pris pour un cinglé. Cécile nous raconte sa
rencontre avec les petites-filles du facteur. Des dizaines d’années après sa
mort, alors que la consécration officielle (Malraux et cie) était passée par
là, les membres de sa famille n’avaient pas changé de regard sur lui !
Suite de la visite du Palais du
Facteur :
Ses auto-citations écrites sur les murs
de son palais, truffées de fautes d’orthographe (elles ont mystérieusement
disparues quand les phrases du facteur sont reproduites dans les brochures
touristiques, blasphème !).
« La vie est combats »
« Ce que Dieu écrivit sur ton
front’arivera »
Il sait aussi bien faire parler sa femme
que sa brouette :
« Je suis fidèle compagne
du travailleur intelligent
qui chaque jour dans la campagne
cherchait son petit contingent »
« Moi, sa brouette, j’ai eu cet
honneur
d’avoir été 27 ans sa compagne de labeur »
À l’intérieur du Palais : « J’ai
voulu dormir ici ».
J’attire l’attention de François sur
cette formule irrésistible que l’on retrouve en plusieurs endroits du palais,
et que l’on pourrait faire figurer sur les quatrième de couv’ de nos
livres :
« TRAVAIL D’UN SEUL HOMME »
Nous avons beaucoup ri. Et je n’ai pas
manqué d’acheter un portrait-carte postale du grand homme. Dire qu’il a
commencé son œuvre à 43 ans ! À 70, il la finissait pour s’atteler à son
tombeau qu’il acheva à 86 ans, juste avant de mourir).
(1)
(1)
par déontologie, Cécile a toujours refusé les cadeaux. Un jour, un
peintre qui avait appris indirectement qu’elle aimait son travail, lui a envoyé
trois petites œuvres. Elle les lui a renvoyées avec un mot d’explications, je
ne peux pas accepter, etc. Le type les lui a renvoyées à son tour, mais pas du
tout, vous n’avez pas compris, je ne tiens pas à vous demander quoi que ce
soit, mais simplement à, etc. Elle les lui a renvoyées une nouvelle fois avec
un mot « si, à l’avenir, vous faites une exposition, soyez certain que je
n’en parlerai pas… »
Lundi 21
mars
Sur la TAZ.
Très riche et très discutable.
Lors de la fête organisée au Théâtre des
Asphodèles, je me procure un recueil de poèmes de Eeva-Liisa Manner (« Le
Rêve, l’ombre et la vision », chez Orphée/La Différence)
« Marcher, marcher sans rien
atteindre
à travers la saleté et la neige, la
touffeur épisodique
et le terrible passé et la glaciation,
celle qui fut et celle qui viendra ;
dormir dans la neige et faire fondre avec
son corps
une plaque nue du grand glacier commun,
apprendre l’art des mains, la lente
espérance,
construire une maison éventée et laisser
entrer les pluies,
trouver un chemin révolu et des pierres
polies,
muette densité de la pierre ; des
humains aussi,
et haïr son prochain comme
soi-même ;
manger des glands et des pignes, de la
provende d’oiseau,
partager son repas avec les animaux
et apprendre leurs figure, leur langue et
leurs traces rapides. »
(traduit
du finnois par Jean-Jacques Lamiche)
Je saisis mon « Petit Robert »
pour chercher les définitions de « provende », de
« ferler »…
Cet ami d’ami qui trimballe avec lui son
ordi tout au long de sa virée croix-roussienne. À minuit passé, il ouvre son
ordi et exhibe les photos hilarantes de ses parents qu’il conserve sur son disque
dur (un diaporama montrant sa mère en train de plonger dans l’eau lui arrache
des larmes de rire).
À peine m’étais-je assis autour d’une table,
entouré de huit détenus, que l’un d’entre eux me tend quelques feuilles
photocopiées. Une nouvelle de Zweig (extraite de quel recueil ?) intitulée
« VIRATA ». Comme son titre l’indique, l’histoire se passe en Inde,
et le conte s’ouvre sur deux citations des Upanishads. Exemple :
« Ce n’est pas en
évitant d’agir qu’on se libère en vérité de l’action,
Jamais on ne parvient à
s’en rendre entièrement libre, fût-ce un instant. »
Moi :
- Pourquoi vous me refilez cette nouvelle ?
Le
détenu : - Pour que vous la
lisiez. Vous connaissez Zweig ?
-
-
Oui. Mais pas ce texte là…
-
-
Emmenez-le chez vous, quand vous
sortirez, tout à l’heure.
-
-
Je le lis et vous le ramène, promis.
Évidemment, cet homme n’avait pas lu mon
« Idiot » (je ne me suis pas présenté comme auteur). Pourquoi est-ce
à moi et non à Fabienne ou à Sylvie qu’il a refilé cette nouvelle de
Zweig ?
Jeudi 16 mars
Souvenir de ce garçon remarquable, très
impliqué dans diverses luttes écolo-urbaines. Il y a 10 ans, je le voyais à
l’œuvre, n’économisant jamais ses forces. Sa générosité était immense. Et
pourtant, quelque chose n’allait pas, dans son attitude. Malgré (à cause de)
son anticléricalisme déclaré, il avait un côté « moine-soldat » qui,
tour à tour, m’agaçait et me fascinait. Très vite, cela m’a plus agacé que
fasciné. Il détenait la Vérité, il se voulait un Pur (comme nombre de khmers
verts, d’altermondialistes d’aujourd’hui). Quand il a écrit à l’Evêché pour
être radié des listes des baptêmes, je me souviens lui avoir dit que son
attitude était suspecte à mes yeux. Son rejet était trop fort pour être
honnête.
Aujourd’hui,
j’apprends qu’il fréquente l’église. Et je ne suis pas surpris.
Mardi 15
mars
Dans ma boîte aux lettres, deux paquets
from Belgium. Le 28ème numéro de l’excellente revue Microbe dont s’occupe Éric Dejaeger (je suis flatté d’y trouver
l’un de mes textes) et le dernier recueil du même Dejaeger, aux éditions
Memor : « Contes de la poésie ordinaire » (avec des
illustrations de Joaquim Hock).
Extraits :
« LES
CHOSES À MOITIÉ
Je m’habille tout en noir. Ou tout en bleu. Parfois en
noir et en bleu, voire en bleu et noir. Dans ces deux derniers cas, j’ai
l’impression de n’être qu’à moitié moi-même, l’autre moitié perdue dans le
panier à linge sale. »
« JARDIN
L’HIVER
Nuit froide et claire de janvier. Pendant une heure, j’ai
suivi la course de je ne sais combien d’avions. Aucun n’a percuté une étoile. À
croire qu’elles ne signifient rien pour les terroristes. »
On peut
le commander en librairie ou envoyer un chèque de 15 euros à l’ordre de MEMOR à
l’adresse suivante :
Microbe, Launoy 4, (B-)
6230 Pont-à-Celles Belgique
Samedi 12
mars
Le dernier caravansérail de Ariane Mnouchkine au Palais des Sports de
Lyon. J’arrive un quart d’heure avant le début du spectacle, sans billet.
Devant l’entrée, on cherche des places, on n’en vend pas (public Téléramesque).
Je m’inscris sur une liste d’attente. Quand sonne l’heure du début du
spectacle, je suis le dernier sur cette liste d’attente, le dernier qu’on
laisse entrer dans la salle, le dernier à chercher une place dans les gradins.
N’en trouvant pas, je m’assois sur une marche. On vient me chercher pour
m’installer au premier rang. À l’extrême gauche (vu de la scène). En face d’une
rampe par où ne cesseront de passer, courant et portant du matériel, frôlant
mes genoux, des dizaines de comédiens trois heures durant. Vingt centimètres
derrière moi, une présence verticale : Ariane Mnouchkine. Voilà, cela peut
commencer, je suis dedans.
Ariane est le plus beau de tous les
prénoms. Ma fille en sait quelque chose.
Vendredi 11
mars
« 9 songs » bien moins
intéressant que « Intimité »
de Chéreau (dans les deux cas, sex in London). Et qu’on ne vienne pas me dire
que c’est une question d’âge ! À 20 ans, j’aurais aussi préféré le Chéreau
(son meilleur film).
Ce que j’ai le plus apprécié dans le film de Winterbottom,
c’est la fermeté avec laquelle il s’en tient à son parti-pris de départ :
une scène de concert, une scène de sexe, une scène de concert, une scène de
sexe... Refus de tout ressort dramatique.
Jeudi 10
mars
Histoire de contredire le texte daté de la veille, je
serais heureux de recevoir votre avis, un petit retour de votre part au sujet
de ce journal en ligne. Vous pouvez aussi bien intervenir sur le forum que me
l’envoyer en privé (frederick.houdaer@laposte.net).
Et pas de langue de bois, s’il vous plaît ! Le lisez-vous régulièrement,
qu’est-ce qui vous touche, vous frustre, vous gêne dans son contenu, vous
pousse à y revenir, etc.
Mercredi 9
mars
MERCI DE NE PAS ME RÉPONDRE
n’y rien
entendre
à la musique
trouvez-vous
qu’il y a
trop
de notes
chez Mozart ?
oui
non
sans opinion
trouvez-vous
que la musique
adoucit les mœurs
?
quelles mœurs ?
voulez-vous mon
opinion ?
voulez-vous
vraiment
mon opinion
sur les
musiciennes ?
Mardi 8 mars
Quelques
photos de la Cambuse
du noir où j’ai passé le week-end.
Lundi 7 mars
« Printemps des poètes »
oblige, lecture de mes textes dans une mairie, sous le portrait officiel du
Président. Ça a visiblement plu au grand Jacques. Je lui ai parlé presque trop
gentiment entre deux poèmes.
Jeudi 3 mars
au bout du bourg
une ancienne usine de « je ne
sais quoi »
a fermé ses portes
la production a été délocalisée
on ne sait où
on ne sait pas grand chose
mais on en parle
on ouvre sa bouche
malgré les mouches qui ont envahi
le café
en se moquant de la saison
le journal qui passe de main en
main
ne suffit pas à les chasser
Mercredi 2
mars
"Ce n'est pas faire preuve de
courage que de s'en prendre à des choses séculaires ou désuètes, pas plus que
de provoquer sa grand-mère. L'homme réellement courageux est celui qui
brave les tyrannies jeunes comme des matins et les superstitions fraîches comme
les premières fleurs..."
Chesterton
Mardi 1ier
mars
GENERIQUES
films
médicaments
tous ne se valent pas
certains contiennent
une plus grande concentration
de paracétamol ou de
stars
que d’autres
Samedi 26
février
il est historien de
formation
si l’on en croit la
légende qui figure sous sa photo
dans le journal
il se fait fort de
nous expliquer
le pourquoi de
certaines superstitions
son analyse est censée
mettre à mal
des légendes
populaires qui se perdent dans la nuit des temps
à mieux regarder son
portrait
on lit dans son regard
une tristesse incommensurable
sa veste rouge n’y
peut rien changer
Il n’est pas n’importe qui. Il préside la World Sunset Bank. Sur son site, il
glane mille et une images de couchers de soleil. Un jour, une amie lui envoie
le cliché d’un lever de soleil, en faisant croire qu’elle l’a pris juste avant
le crépuscule. Il n’y voit que du feu et l’intègre à sa collection. Quand elle
lui dévoile le pot-aux-roses, il se fâche tout rouge.
Vendredi 18
février
Trouvé à la cave un exemplaire du Monde
daté de 2000 :
"C'était un homme gentil, généreux
et prenant soin des autres", soupire la veuve de Tom Ferebee, mort 55 ans
après avoir largué une bombe sur Hiroshima, vendredi 17 mars, en Floride.
Jeudi 17
février
Ce
n’est pas tous les jours que l’on aveugle un cyclope, que l’on rencontre Calypso,
Nausicaa ou Circé. Mais il y a des périodes comme ça, des périodes qu’il vaut
mieux traverser ficelé au mât de son navire.
Là
où certains parlent de « la nature de Bouddha » en la voyant chez les
uns et chez les autres, je préfère parler de « la nature d’Ulysse »,
de ma nature d’Ulysse, de la vôtre, de la nature de tout homme.
Je comprends pourquoi Kazantzaki a commencé sa vie avec le
Christ et a fini avec Ulysse (voir son autobiographie « Lettres au
Gréco »).
Mercredi 16
février
aujourd’hui
j’ai lu un livre de
Bobin
j’ai bu moult alcools
conclusion
Bobin me rend
alcoolique
Mardi 15
février
X-ROUSSE.
J’habite au sommet d’une colline. C’est la ville, mais on y respire.
Rien à voir avec le centre-ville où je descends le moins possible.
Il n’est pas rare qu’un hérisson ou qu’un caddie fou traverse ma rue.
La Croix-Rousse n’est pas le centre de Lyon, et je n’habite pas le
centre de La Croix-Rousse
Les arbres sont nombreux dans mon quartier. Je
reste incapable de les identifier. Des noms d’arbres, j’en ai trouvé plein dans des livres
faits avec du bois coupé, sans jamais en retenir aucun.
Dimanche 13
février
Vendredi 11
février
nous ne
sommes pas encore dans le Vercors
je dois
au préalable
boire
trop de café
mettre
de l’essence dans la voiture
laisser
ma progéniture à mes ascendants
dans le
sac
sur mes
pulls
je jette
un livre consacré à Gurdjieff
un autre
à Léonard Cohen
dans le
sac
sur mes
pulls
je jette
un roman qui a failli décrocher le Goncourt
un
recueil de poésie qui n’a pas rapporté un centime à son auteur
dans le
sac
sur mes
pulls
je jette
la biographie d’un homme disparu sans laisser de trace
un essai
très intelligent sur un sujet indéfinissable
cela
devrait suffire pour le week-end
j’interroge
ma femme
quelle
distance a-t-elle prévue que nous marcherions
déjà ?
Une
lecture. Pas une de plus. De quoi
intéresser et faire hurler nombre de mes amis. De quoi me nourrir longtemps.
Sur Ginsberg, sa poésie, sa cuisine, la méditation et le reste, un entretien ici.
Mercredi 9
février
A la télé, un comédien sexagénaire joue
le rôle d’un flic quinqua. Il claque avec violence la portière de sa bagnole de
fonction. La Force est en marche…
lundi 7
février
ce
qu’elle flashe
ne fait
ni chaud ni froid
à la
photocopieuse
faux
elle
chauffe
Dimanche 6
février
Aux amis qui souffrent et n’ont pas
besoin de vaines consolations…
Je ne sais pas. Parmi les nombreuses
pages de Miller que j’ai pu recopier, il y a ces deux passages que je souhaite
copier-coller.
“ Quand j’abaisse les yeux vers
ce foutu con de putain, je sens le monde entier sous moi, un monde qui
chancelle et s’écroule, un monde épuisé et poli comme le crâne d’un lépreux.
S’il y avait un homme qui osât dire tout ce qu’il pense de ce monde, on ne lui
laisserait pas un pouce de terrain pour s’y tenir. Quand un homme apparaît, le
monde lui tombe dessus et lui casse les reins. Il reste toujours trop de
piliers pourris, trop d’humanité infecte pour que l’homme puisse s’épanouir. La
superstructure est un mensonge et le fondement une vaste peur frémissante. Si
par intervalles plus que séculaires, paraît un homme au regard avide et éperdu,
un homme qui mettrait le monde sens dessus dessous pour créer une nouvelle
race, l’amour qu’il porte au monde tourne en bile et il devient un fléau. Si de
temps en temps nous découvrons des pages qui explosent, des pages qui blessent
et flétrissent, qui arrachent des gémissements, des larmes et des malédictions,
sachez qu’elles viennent d’un homme acculé, un homme dont la seule défense sont
ses paroles, et ses paroles sont toujours plus fortes que le poids mensonger et
accablant du monde, plus fortes que toutes les roues et les chevalets de
torture qu’inventent les lâches pour anéantir le miracle de la personnalité. Si
quiconque osait jamais traduire tout ce qui est dans son cœur, exposait ce qui
est réellement son expérience, ce qui est vraiment sa vérité, je crois que le
monde se fracasserait, volerait en éclats, et aucun Dieu, aucun accident,
aucune volonté ne pourraient jamais en rassembler les morceaux, les atomes, les
éléments indestructibles qui l’ont fait ce monde. ”
Henry Miller, Tropique du Cancer (trad.
de Gérald Robitaille)
« En ce temps-là, je n’osais penser à rien d’autre
qu’aux « faits ». Pour aller chercher sous les faits, il m’eût fallu
être artiste, et on ne devient pas artiste du jour au lendemain. Il faut
d’abord qu’on soit écrabouillé un bon coup, que soient annihilés les éléments
de contradiction que l’on porte en soi, que l’on soit entièrement balayé en
tant qu’être humain, pour renaître en tant qu’individu ; carbonisé et
minéralisé afin de s’élever progressivement en partant du dernier dénominateur
commun de soi. Il faut dépasser la pitié si l’on veut que la sensibilité parte
des racines mêmes de l’être. On ne fabrique pas un nouveau ciel, une nouvelle
terre avec des « faits ». Il n’y a pas de « faits » :
il n’y a qu’un fait, qui est que l’homme, n’importe quel homme n’importe où
dans le monde, est en voie d’ordination. Certains prennent la route la plus
longue, d’autres la plus courte. Tout homme travaille à sa destinée à sa façon
et personne ne peut lui venir en aide, si ce n’est par générosité, bonté et
patience. Dans mon enthousiasme d’alors, bien des choses m’apparaissaient
inexplicables qui éclatent aujourd’hui. »
Tropique
du Capricorne, Henry MILLER
Je fais quoi, là ? Le
prêchi-prêcheur, le Saint-Bernard que personne n’a appelé ? J’aggrave mon
cas avec une dernière salve (de Nimier cette fois, extrait de « Les
écrivains sont-ils bêtes ? ») :
« Pour la vérité, il suffit d’ouvrir les yeux et
de voir –voir la réalité telle qu’elle est. Mais comment est-elle ?
Rectifions : voir la réalité telle qu’elle est la plus forte. Désarmer les
choses, voilà déjà tout un destin d’écrivain. »
Jeudi 3 février
Voilà un
texte que j’ai envoyé à une flopée d’adresses électroniques :
« Il s’est passé quelque chose l’été dernier. Pour
moi. Pour tous ceux qui ont assisté à une représentation de “ La
semeuse ” lors du festival de Pelussin.
“ La semeuse ” se joue à Lyon, en ce début février. Les miracles ne se renouvellent pas. Ils peuvent se prolonger, connaître des répliques, ce qui n’aurait rien que de très logique pour des séismes.
“ La semeuse ”, c’est d’abord un texte de Fabrice Melquiot, un jeune dramaturge à l’écriture magnifique.
Viennent ensuite Ariane Echallier, Coralie Trichard et Benoît Thévenot. La première met en scène. On y reviendra. Les deux autres, ce sont les comédiens. Les bombes humaines. C’est peu dire que leur engagement est total dans “ La semeuse ”, que ce qu’ils font de leur corps, de leur langue, est casse-gueule. Cascades sentimentales, toutes de finesse… les plus dangereuses.
Ariane Echallier donne autant. En amont. Elle s’expose au-delà de son corps. À ce stade, on ne parlera même plus de déséquilibre.
Je vous copie-colle le
topo officiel :
« Je prends la route vers te quitter puisque tu
pars". Elle, une amoureuse abandonnée, perdue, part seule à la montagne,
en Italie, au Portugal, en Espagne. Elle fuit partout où elle pourra se saouler
de bières, s'étourdir de café pour vomir son histoire d'amour. Orgueilleuse,
désinvolte, parfois insipide, elle se purge tant bien que mal de son inconstant
amant. Lui, cruel et solitaire, semble détaché de tout et la hante de ses mots,
de ses poèmes qu'elle tente de disséminer dans son voyage.
La semeuse est une danse d'images, à la frontière des corps et des mots qui
raconte la solitude, l'errance et l'histoire d'un amour cédé à la
parole. »
Avec un synopsis pareil, on est en droit de
craindre le pire. On aura le meilleur. La mise en scène d’Ariane Echallier.
Découvrir son travail, c’est vivre une vraie rencontre. Aïe, je viens d’écrire
le mot “ rencontre ”. Je vais écrire bien pire.
De la mise en scène de cette pièce se dégage une violence inouïe, un amour qui ne vise, ne frappe pas que le texte, les comédiens, le public… Cela vous traverse, vous porte, vous soulève. Un coup de poing, vous dis-je… capable de vous relancer le cœur après une panne cardiaque. Quelque chose qui vous sauve.
Il m’est arrivé quelque chose à Pélussin, l’été dernier.
Un choc théâtral comme je n’en avais pas vécu depuis… ma découverte de Jacques
Séréna au Point du Jour.
Allez voir une pièce dans l’année. Allez voir “ La semeuse ”. Je rembourse si pas convaincu(e).
par le Théâtre de Lalue
du 7 février au 12 février, 20h30
ça se joue à
La Scène sur Saône/le Croiseur
4 rue Croix Barret 69007 Lyon, 04 78 42 86 86
Mercredi 2
février
Passage terrible dans “ Rencontres
avec Bram Van Velde ” de Charles Juliet :
“ Je lui parle d’un garçon que je
connais, qui admire des écrivains et des peintres qui se situent aux antipodes,
dont la démarche n’a rien de commun.
La réponse jaillit sur-le-champ :
- Ça montre combien sa tête est loin de
son œil. ”
Bram Van Velde = LE lien entre Juliet
et Djian. Tout deux lui ont consacré un livre. À ma connaissance, cela n’a
jamais été souligné par les critiques.
Mardi 1ier
février
J’emprunte
un bouquin vieux de quinze ans “ Panorama du polar français
contemporain ”, histoire de peindre quelques trognes supplémentaires de
noireux dans mon nouveau roman. La couverture du bouquin est exemplaire :
un dessin très B.D représentant Delon, Signoret, Gabin et quelques autres (dont
Miou-Miou en “ femme flic ” !) regroupés autour d’un brancard.
Pourquoi foutre des acteurs en couverture d’un bouquin ne causant que des
auteurs pour une fois sortis de l’ombre ?
Lundi 31 janvier
Enième opération sur mon vélo (un pneu
crevé à réparer depuis un mois!). Malheureusement, celui que Miller a surnommé "mon meilleur
ami" ne comprend pas que je ne désire que son bien... et il ne se laisse
pas faire !
Lectures :
"Les usages de l’éternité" essai de
Patrick Kechichian sur Ernest
Hello
« Les auteurs de la Série Noire, Voyage au bout de la Noire, 1945-1995 »
Dimanche 30 janvier
Qui m’a appris que Kerouac n'avait pas
son permis de conduire ? “ Sur la route ”, ha-ha !
« Vous êtes la guérilla contre la mort climatisée
qu’on veut vous vendre sous le nom d’avenir. »
Samedi 29 janvier
Etrange rêve fait cette nuit
(et ce n'est pas la première fois) : je me perds dans un cinéma
labyrinthique, une sorte de multiplexe aux couloirs interminables. Quand
je rentre dans une salle de projection, c'est pour "rentrer" dans le
film qui éclaire l'écran et avoir le plus grand mal à en sortir... mais
pas moyen de sortir du cinéma lui-même. Un rêve presque trop exemplaire
(j’ai hésité à le noter).
“ Ils n’ont pas encore de
machines à détecter les rêves subversifs, mais ça viendra : faisons-leur,
en ce domaine, le plus large crédit. ”
André Hardellet (Lourdes,
lentes)
DVD : "Une femme sous influence".
Casavettes / Gena Rowlands. Un film d’amour, ça ressemble
à ça, pas à West Side Story.
Une
dernière notule cinématographique comme ça, l’air de rien, pour dire
l’époque : « Bad Lieutenant », LE film catholique de ces
dernières années (j’ai bien écrit « catholique ») est classé X aux
Etats-Unis et purement et simplement interdit en Irlande. Il y a 40 ans, avec
son sulfureux « Théorème », Pasolini décrochait le Grand Prix de
l’Office Catholique.
Je n’en
conclus rien.
Vendredi 28
janvier
Déjeuner avec l’ami François
Barcelo (le premier québécois publié dans la Série Noire)
au resto croix-roussien « Mon père était limonadier ». François est
en résidence d’auteur à Lyon pour trois mois. Il est arrivé à Lyon-ST-Exupéry
la semaine dernière, en même temps que la neige. Je n’ai jamais vu le boulevard
de la Croix-Rousse ressembler à ce point à une avenue de Montréal. Le marché
baignait dans la slotche. Nous avons dû nous cramponner à
une rampe pour contourner le Gros Caillou et gagner la place Bellevue. Mais pas
de glissade aujourd’hui.
Tout à
la joie des retrouvailles, j’ai oublié de le questionner sur l’avenir de la
Série Noire.
Hier,
François a fait du vélo. Il est fou (et c’est un ancien kamikaze à deux roues
qui l’écrit).
En parlant de fou… Rien à voir avec François sur son vélo
un peu plus haut. Dantec (je
sens que je vais faire souffrir certains de mes amis). Ça ne choque personne
qu’il se trouve actuellement sans éditeur, que Gallimard puis Flammarion
n’aient pas osé sortir le tome 3 de son Théâtre des Opérations. Ce n’est pas
que je me fasse du soucis pour l’avenir éditorial de Maurice G., mais ses
tribulations actuelles en disent long sur l’état de l’édition française et son
auto-censure permanente.
Là
encore (voir plus bas, à la date du 24 janvier), ça devrait être une porte
ouverte que j’enfonce. Et bien non, ce n’est pas le cas.
Antoine
Gallimard s’est dégonflé en premier. Son pirate de grand-père, lui au moins,
était capable de dire à Nimier « Il n’y a qu’avec Drieu et avec ? que
je ne me sois pas emmerdé. »
En tant
que lecteur, un débat (un peu, beaucoup) contradictoire entre Dantec et…
mettons Daeninckx (ou Marhic, qui est sûrement moins cher, connaît aussi bien
les sujets à aborder, est peu suspect de, etc.), voilà quelque chose que
j’aimerais voir, qui nourrirait ma réflexion. Malgré les innombrables salons du
polar qui fleurissent en France, c’est tout simplement IMPOSSIBLE. Quelle radio
organiserait une pareille rencontre ?
Il y en a un qui connaît également bien les sujets,
est peu suspect de, etc. C’est Pouy. Pouy connaît bien Dantec. Il l’a connu
tout jeune. Dantec et Benacquista, et d’autres, étaient « ses
élèves ». Pouy n’était pas prof mais conseiller d’orientation ou pion ou
un truc comme ça.
J’ai
questionné directement Pouy sur Dantec, l’automne dernier. Tous deux, nous
participions à un salon du livre où il n’y avait pas un rat. Nous avions bouffé
à trois (Pouy, Pierre-Jean Balzan éditeur -la Fosse aux Ours- et moi), et
durant tout le déjeuner, Pouy et Balzan avaient parlé des problèmes de la
petite et de la moyenne édition, et tout ce qu’ils avaient dit n’était pas
tombé dans l’oreille d’un sourd (je gamberge sérieusement autour de l’idée
d’une petite structure éditoriale, des problèmes de distribution, etc.).
Après le
repas, je demande à Pouy « t’en es où avec Dantec ? C’est quoi
ton histoire avec lui ? »
Je
regrette de ne pas avoir noté immédiatement ce qu’il m’a dit. Disons qu’il m’en
parlé avec une réelle chaleur humaine, qu’il mettait les courriels de Maurice
G. avec les Identitaires sur le compte de sa naïveté, qu’il lui reconnaissait
un gros talent, depuis le début, etc. Évidemment, chacun des deux avait les
pieds posés sur un continent différent. Mais rien à voir avec le Pouy que j’ai
découvert en 1999 lors d’une table ronde à la Bastille (mon premier salon en
tant qu’auteur), date à laquelle il se vantait d’avoir aidé à virer tous les auteurs
de droite de la Série Noire. Je me souviens de ma consternation à l’époque, de
mes pensées du style « c’est fini le temps où un Manchette pouvait
publiquement reconnaître le talent d’un A.D.G tout en l’appelant son
ennemi ».
Dans un
journal que j’ai tenu il y a deux ans (avant que je n’apprenne l’existence des
blogs), j’ai recopié et commenté le portrait chinois de Pouy. Son principal
défaut ? La méchanceté. C’est ce qu’il répondait. Je n’en suis pas si sûr.
Pouy ne
tient pas un double langage. Mais je le crois aussi compliqué que son écriture
(merde, c’est un écrivain !).
Son
écriture, j’ai eu l’occasion de la goûter, de la mâcher (voir aussi ma rubrique
« Frédérick lecteur »). Je fais partie d’un groupe de « lecteurs
à voix haute », « Abus de langage ». L’année dernière, j’ai lu
en public (et dans un jardin ouvrier) les premières pages de « La belle de
Fontenay ». Je les ai portées sur le bout de ma langue. Il m’en a coûté un
sacré travail en amont. L’écriture de Jibé, je l’ai redécouverte de l’intérieur,
elle est encore plus complexe que je ne le pensais. Et pas faite pour être lue
à voix haute, d’après le même Jibé. Sûr qu’il n’écrit pas à l’oreille.
Donc,
QUI organisera un débat Dantec-Pouy (je sais qu’il y a des journalistes qui me
lisent) ? Et d’où viendront les freins, qui érigera des barrages ?
One shot :
“Celui qui se consacre au roman noir doit rencontrer la
métaphysique tôt ou tard, car toute sa concentration, que ce soit dans la vie
ou dans l’écriture, est dirigée vers ce combat sans fin entre le bien et le
mal; sa carrière est comme une vie entière de travail passée à franchir chaque
jour à bicyclette dans les deux sens la frontière entre un pays civilisé et
l’Allemagne nazie.”
Robin Cook (si la citation était de Dantec, j’imagine les
réflexions qu’elle s’attirerait…)
Jeudi 27
janvier
Pour
Géhef (multilingue) :
"To begin to define Selby's brilliance and power, you have to
go back to the rhythms of Homer, Hesiod, and Sappho; back to the dark and light
and beauty of Dante; and back to what lay beyond and beneath that sign on the
Belt Parkway from which he took the title of his first novel. Everything that
Herman Melville, that other great ex-seaman, and no stranger to Brooklyn, is
held up to be in the pantheon of American literature, Hubert Selby, Jr., is.
What Moby Dick was to Melville's century, Last Exit to Brooklyn is to ours, and
between the two, Selby's is the better book. If that be called heresy, know
that it be called so only by those of the same dead mind as they who allowed
Melville to die unknown. There are only a few American writers who are in
Selby's league, and in a wholly different way: Peter Matthiessen at his best;
Philip Roth, maybe, when he takes off his yarmulke. And if you want to talk
about living fucking legends, when it comes to writers, Selby is the only game
in town. I mean, this guy should be wearing fucking laurel leaves and pulling
down a million a year." (Nick Toshes)
Mercredi 26
janvier
Me hantent encore les images de « L’année du dragon » repassé
dernièrement sur Arte. La première fois que je les ai vues, j’avais 17 ans, et
j’ai tout de suite su qu’elles sonnaient le glas de mes belles idées. Aucun
regret.
Dans ma boîte aux lettres, une épaisse enveloppe qui
arrive de Belgique : l’intégrale (ou presque) Éric
Dejaeger, auteur-éditeur avec lequel Renaud Marhic
m’a mis en contact. Un vaste trafic de Speculoos poétiques est en train de se
mettre en place. Je ne puis en dire plus, sans mettre la vie des miens en
danger… Je tenais simplement à dénoncer ces deux individus.
Au passage, j’apprends grâce à eux que de très nombreux
textes de Bukowski restent inédits, des poèmes pas encore traduits en français
ni publiés.
Et zou, un petit morceau du sieur Dejaeger, reproduit sans
son autorisation (il est trop cher) :
« Mes voisins savaient que je lisais beaucoup et
qu’il m’arrivait d’écrire de la poésie, deux activités assez mal considérées
dans le quartier.
À chaque barbecue, ils s’amusaient à lancer des livres de
gare par-dessus la haie en criant « pull ! ». Il savaient aussi
que j’étais le seul dans le coin à ne pas posséder de riot-gun.
Un dimanche midi ensoleillé, alors qu’ils se livraient à
leur jeu favori, je ripostai en leur envoyant quelques uns de mes derniers
poèmes.
L’effet fut immédiat : ils cessèrent. Et déménagèrent
le lendemain. Depuis, je laisse toujours l’un ou l’autre petit poème bien en
vue quand je dois partir en espérant que les voleurs ne soient pas
analphabètes. Je n’ai aucune envie d’acheter un riot-gun. »
Extrait
de « Elagage Max », éditions Mémor, collection Transparences
Mardi 25
janvier
Perdu dans Vaulx-en-Velin (un atelier d’écriture à
animer). Je ne l’invente pas ce panneau qui m’indique la direction du
« CIMETIÈRE DE L’ÉGALITÉ ».
-
-
J’ai jamais vu le Roi Lear tout seul, dit la libraire excédée à sa
cliente. On nous le fourre toujours avec Hamlet ou une autre pièce de
Shakespeare.
-
-
Vraiment ? C’est pas possible de trouver juste le Roi Lear en
livre ?
-
-
Pas tout seul. Le Roi Lear n’est jamais tout seul. Avec Hamlet, les
trois-quarts du temps. Je vous l’ai dit.
Les deux femmes étaient charmantes.
Lundi 24
janvier
Claire :
-
- Tu me
stresses, quand je te vois manger ta pomme.
-
- Quand je
quoi ?
-
- Quand tu
croques ta pomme aussi vite, comme ça. Tu la manges comme un carnivore. Je vois
mon homme croquer dans une pomme, et je vois un carnivore !
-
- Même
quand je croque dans une pomme bio ?
Dispution (discution + dispute) au
téléphone avec un ami, auteur d’un « Poulpe ». Cela fait deux ans que
je sais la chose suivante : la date de décès officiel de Gabriel
Lecouvreur dit « Le Poulpe » est le 21 avril 2002. Ça devrait être
une évidence, une porte ouverte que j’enfonce, là.
Dimanche 23 janvier
Recopiées
dans mon disque dur depuis belle lurette, ces phrases somptueuses signées
Anouilh et Audiberti. Question, où les ai-je repêchées ? Ce n’est pas un
jeu… Je l’ignore vraiment. Qui me
rafraîchirait la mémoire ? Le forum est fait pour ça !
“ Je
veux que tout redevienne difficile, qu’on paie tout soi-même, l’amour et la
liberté, et que ça coûte cher. ”
“ La
rage de découvrir une droite et une gauche dans le strict domaine du style ne
se recommande, certes, d’aucune science, d’aucune méthode. Il n’est pas
interdit, néanmoins, de constater que l’aisance, la fluidité, disons
“ aristocratique ” de la plupart des écrivains du XVIIIème siècle,
reliées à la prose incolore et suprêmement aisée de Fénelon et de Mme de La Fayette,
se prolongea jusqu’à nous dans un certain ton élégant, désinvolte, volontiers
bâclé, où se restitue le langage parlé d’une bonne société altière et
bien-disante. Cette formule rassemblerait à la fois Lamartine, Alfred de
Musset, les gens qui écrivent leurs mémoires, tous ceux qui pratiquent un
rythme moralement “ impair ” à la fois coulant et entrecoupé, talon
rouge même si le signataire s’appelle Verlaine. A cette formule s’opposerait le
martèlement laborieux, cordonnier, forgeron, “ prolétaire ” de
certains, Michelet, Hugo, Péguy. Ceux-là, par une sorte de hantise matérielle
et carrée de la phrase, quels que soient par ailleurs les souffles qui les
portent, ceux-là suggèrent la C.G.T. Chateaubriand est à cheval sur eux et sur
Talleyrand. Ces forgerons prosodiques engendrent Jaurès. Zola frappe à leur
porte. Ils montrent sans cesse leurs bras, leur sueur. Ils ont, au moins, un
prédécesseur, Bossuet. En effet Bossuet, comme Hugo, fait valoir le muscle. Il
brandit le marteau. Mais Stendhal (…), comme Saint-Simon, tout en passant sa
vie à écrire, donne l’impression qu’il n’en a pas le temps, requis par des
rendez-vous, des bains à prendre, des pédicures, des archevêques. Leconte de
Lisle, travaillant ses vers sous un étau, serait un écrivain de gauche. De
droite, Jean Paulhan, pour autant qu’il feint de pondre du bout des doigts. De
droite aussi Drieu La Rochelle, toujours à la limite de la faute d’orthographe,
par dandysme subtil, par brillant laisser-aller. Mais cette division, je le
répète, n’a quelque sens qu’en cuisine écrivassière pure. ”
Audiberti
Lyon,
c’est deux prisons au bord d’un fleuve.
Lyon, c’est un roi sur un canasson au milieu d’un
immense terrain de tennis au centre d’une presqu’île.
Lyon,
c’est une ville internationale où personne ne parle de seconde langue.
Lyon,
c’est une ville où je ne suis pas né et où je ne mourrai pas.
Lyon,
c’est la ville où sont nés mes enfants et où mourront mes parents.
Lyon,
c’est l’Histoire qui garde en permanence sa main sur votre épaule.
Lyon,
c’est de moins en moins de cabines téléphoniques.
Lyon,
c’est une assemblée de toques blanches qui prend la pose devant des jets d’eau.
Lyon, c’est…
Vendredi 21
janvier
« Je
médite, ce qui n’est pas pour plaire à mon éditeur. »
Extrait
de « Ceci est bien une pipe », 172e aventure du
commissaire San-Antonio
Mardi 18
janvier
Rêve de cette nuit, sa toute fin (sur le coup des
5h) : On me demande (qui déjà ?) quel rôle je souhaite jouer,
celui d’un enfant ou celui d’un flic ?
Lundi 17
janvier
Je pense à deux personnes. Le seul que je peux citer
s’appelle Dominique Salon. Retenez bien ce nom.
À
l’heure qu’il est, aucune de ces deux personnes n’a signé avec un éditeur.
J’espère que pour eux l’année 2005 sera celle de la signature de leur premier
contrat. Ils le méritent.
Entendu dans une grande surface, à côté d’une pleine
palette de « Farenheit 11/9 » (le DVD palmé de Michael Moore) :
« KICÉKÉ
MORT ? LETSUNAMILATUÉKI ? »
Trouvé ça.
Un magazine ouvert sur la photo de Charles Juliet. Et
sur la porte de mon bureau, le poster grandeur nature de Bruce Lee (supplément
au numéro spécial « 30e anniversaire » de la revue
KARATE-BUSHIDO). Mes deux maîtres en rigolade ?
Dans « Big Boss », Bruce Lee esquisse quelques
pas de danse après avoir été porté en triomphe par des ouvriers dont il
défendait la cause. Dans la vie réelle, la seule compétition remportée par
Bruce Lee n’est pas un championnat de karaté, mais un concours de danse
cha-cha-cha. Je rêve de voir Bruce Lee dans une comédie musicale, je rêve d’un
match Petit Dragon vs Fred Astair (de son vrai prénom Frédérick, as me !).
Samedi 8 janvier
J’explore la blogsphère depuis… deux mois à
tout casser.
Blog :
quel vilain mot (je suis le combientième à le noter ?).
A propos de sphère.
Dixit Peter Sloterdijk (copié-collé sur www.antagonisticart.com):
Jeudi 6 janvier
Combien sommes-nous à avoir un site, un blog et tout le
tintouin… et à ne PAS avoir l’ADSL ?
Alice et Arthur (sept ans à eux deux) émerveillés par
« Barbie et Casse-Noisette ».
Moi,
émerveillé par la phrase de Nimier.
Samedi 1ier janvier
Il y a deux ans, j’achevais
une résidence d’auteur de trois mois à
Montréal. Souvenir de cette boulimie de lecture de classiques français qui m’a
saisi au cœur de cette ville unique mais incontestablement américaine par de
nombreux aspects. Je n’ai retrouvé Selby, Brautigan et cie qu’une fois
revenu à Lyon !
Je continue aujourd’hui à associer Montaigne ou le
Cardinal de Retz à Montréal.